C’est du jamais vu durant un mois de Ramadan. Sur l’avenue Bechara El Khoury, la grande artère qui pénètre à Tripoli, deuxième ville du Liban, les poteaux font grise mine, privés de leurs guirlandes électriques en cette période d’ordinaire festive. Le long des trottoirs de l’agglomération sunnite, pas de décorations, mais des façades de banques saccagées. Au lendemain d’une nouvelle nuit de heurts entre contestataires et forces de l’ordre, une douzaine de personnes font la queue devant un distributeur à billet.
«C'est un des seuls qui fonctionne encore dans la ville, ils ont tous été détruits», explique Daniella, 26 ans, sans emploi depuis des mois, comme la majorité des Tripolitains. La jeune femme, qui dit «ne pas cautionner les violences», redoute que la situation ne dégénère. «Les gens sont à bout, ils ont faim, tout simplement. On entend même que certains seraient en train de s'armer.»
Suspendues en raison de la pandémie de coronavirus, les manifestations contre la classe politique, entamées en octobre dernier, ont repris avec une violence accrue ces derniers jours dans ce bastion de la contestation. Mardi, un manifestant, un jeune homme de 26 ans, est mort à Tripoli sous les tirs à balles réelles de l’armée. Un développement tragique qui vient attiser une colère déjà colossale.
Coup de grâce
Dans la grande ville du Liban-Nord, la plus pauvre du pays, qui compte environ 850 000 habitants, le niveau d'inflation est devenu insoutenable. A l'entrée d'une boucher