De simples masques en tissu imbibés de chlore comme unique protection, qui laissent au visage des brûlures chimiques au second degré. Pas de lunettes, peu de gants. Des médecins mal protégés, des infirmiers et ambulanciers livrés à eux-mêmes. Les témoignages se suivent et se ressemblent : face au virus, les médecins russes sont sans défense. Résultat, sur les plus de 2 300 morts officiels du Covid-19 en Russie - une statistique sujette à caution -, près de 5% sont des médecins ou infirmiers, une proportion dix fois supérieure à la moyenne mondiale.
Une situation paradoxale, alors que la Russie n’a jamais connu de réelle pénurie d’équipements de protection et que n’importe qui peut aujourd’hui se procurer gel, masques FFP2 et gants sur Internet et dans le commerce. N’importe qui, sauf les médecins. La faute à un système d’achats d’équipement médical ultracentralisé, qui a privé les hôpitaux publics de la capacité à commander eux-mêmes le matériel qui leur fait défaut : les directeurs d’hôpitaux sont censés faire remonter leurs besoins à la centrale d’achats du ministère régional de la Santé, qui se charge de regrouper les commandes et d’organiser des appels d’offres avant de répartir les équipements. Mis en place pour lutter contre la corruption et favoriser les économies d’échelle, ce système a montré ses limites dès le déclenchement de l’épidémie.