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Libération

«Il y a au sein de la garde civile [espagnole] des responsables qui tiennent un discours invitant au coup d’Etat.»

Alberto Garzón ministre espagnol de la Consommation
publié le 8 juin 2020 à 18h56

«Il est très possible qu'il y ait des éléments réactionnaires au sein de la garde civile.» Cette déclaration du ministre de la Consommation, le communiste Alberto Garzón, à la télévision, a fait l'effet d'une bombe en Espagne. Suivie d'une autre bombe, toujours à l'endroit de ce corps militaire souvent associé dans l'imaginaire collectif à l'ex-régime franquiste f : il y a dans la garde civile (force de police à statut militaire) des «responsables qui tiennent un discours invitant au coup d'Etat».

En Espagne, le putsch, ou pronunciamiento, rappelle des heures sinistres, comme le 18 juillet 1936, avec celui (réussi) du général Franco, ou le 23 février 1981, avec celui (raté) du lieutenant-colonel Tejero. Même si le ministre a précisé que cela concernait «une infime minorité», il a fallu que la ministre socialiste de la Défense, Margarita Robles, démente. Mais les principaux syndicats policiers ont exigé des démissions.

Le malaise ne cesse de grandir dans un pays où la polarisation politique a atteint une intensité extrême : le gouvernement socialiste de Pedro Sánchez, déjà fragile au Parlement (il dépend du soutien des séparatistes catalans), est accusé par les conservateurs du Parti populaire (PP) et les ultras de Vox d'être à la tête d'une «dictature bolivariano-communiste», responsable d'une «gestion criminelle de la pandémie». Les tensions entre le pouvoir et les plus conservateurs ont crû avec la destitution du colonel de la garde civile, Diego Pérez de los Cobos, qui s'était distingué face à ETA puis contre le référendum d'autodétermination des indépendantistes catalans. Motif avancé par le gouvernement : perte de confiance. Motif officieux : être lié à la divulgation à la presse de rapports mettant en cause l'action de l'Etat dans la lutte contre le Covid-19. Pour le PP et Vox, celui qu'ils désignent comme le «Dreyfus espagnol» a tout simplement été sacrifié sur l'autel du «sectarisme communiste».