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Libération
Éditorial

Failles

publié le 17 juin 2020 à 20h51

Les années passent, les rapports accusent, le cinéma dénonce, les citoyens manifestent et… les produits chimiques polluants et contaminants demeurent. Altérant la santé, voire tuant à petit feu. Ils demeurent parce que certains sont dits «éternels» c’est-à-dire qu’ils restent un temps infini dans l’environnement. Et aussi parce qu’on les trouve dans le moindre objet du quotidien, voire dans des outils essentiels tels que certains dispositifs médicaux ou produits anti-incendie, d’où la difficulté à les repérer. Enfin parce que les réglementations sont trop lâches. Il en existe bien une, que l’on peut mettre au crédit de l’Europe : Reach (Registration, evaluation and authorisation of chemicals), adoptée par Bruxelles le 18 décembre 2006 pour mettre sur pied un système unique d’enregistrement, d’évaluation et d’autorisation des substances chimiques dans l’Union européenne. Mais elle comporte des failles. Les experts de Reach ne se fondent que sur les études transmises par les industriels, pas forcément complètes ou objectives, et surtout n’étudient les molécules que pour certains usages. Or, selon l’emploi, une molécule peut être plus ou moins dangereuse pour l’environnement ou la santé. Une réforme de Reach serait envisagée mais dans combien de temps ? Et que faire de l’imperméable importé d’Asie bourré de substances perfluorées ? Celui-ci n’est contrôlé à aucun niveau de la chaîne de production et de distribution. Faut-il pour autant baisser les bras ? Certainement pas. Contrairement à l’Allemagne et à l’Italie, la France n’a pas fixé de valeurs réglementaires maximales, elle doit s’y atteler. Et aussi analyser plus soigneusement l’eau potable et lancer des études épidémiologiques sur les populations résidant autour de sites industriels. Enfin, la moindre des choses serait de pousser les industriels à proposer des alternatives sûres et surtout d’informer les consommateurs. Afin que chacun puisse choisir de s’empoisonner… ou pas.