Au commencement, il y a une charge de légende inscrite dans tous les manuels d’histoire militaire. Sur cette plaine d’Eylau, le 8 février 1807, 80 escadrons de cavalerie s’apprêtent à fondre sur les derniers carrés russes. Près de 20 000 hommes, montés sur des chevaux aux pattes épaisses et aux sabots lourds, piaffent sur la terre gelée, soufflant la buée par tous leurs naseaux. Ils sont tapis en ordre de bataille, entre deux bois, sur cette plaine de l’actuelle oblast qu’est l’enclave de Kaliningrad, alors en Prusse orientale. Quelque 80 000 sabots labourent le sol puis prennent leur galop pour mieux fondre sur l’ennemi. Un fracas d’enfer grandissant, assourdissant puis, au final, meurtrier. A leur tête, le maréchal d’Empire Joachim Murat, devenu beau-frère de l’Empereur après son mariage avec Caroline Bonaparte, le 20 janvier 1800. Un personnage haut en couleur que ce fils d’un aubergiste et maître de poste, parfaite illustration de l’adage qui veut que chaque soldat de la grande armée «ait son bâton de maréchal dans sa giberne». Avant chaque charge, il a l’habitude de haranguer hussards, dragons, chevaux légers et lanciers en leur criant : «Suivez mon cul, il est rond comme une pomme ! »
«Il faut d'abord s'imaginer le cliquetis métallique des sabres que l'on défouraille. Un épais rideau de neige empêchait toute visibilité. La terre était dure comme du bois. Les Russes n'ont rien vu venir. Ils ont juste enten