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Coulisses de Bruxelles

Des sommets européens sous haute tension virale

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Les dirigeants enchaînent les quarantaines, le Parlement européen joue la carte visio. Il est désormais douteux qu’une réunion physique ait à nouveau lieu avant 2021.
La Première ministre de la Finlande Sanna Marin, celle de la Belgique Sophie Wilmes, la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et la Chancelière allemande Angela Merkel lors d'un sommet le 17 juillet. (FRANCOIS LENOIR/Photo François Lenoir. AFP)
par Jean Quatremer, correspondant à Bruxelles (UE)
publié le 19 octobre 2020 à 7h23

Le travail des institutions communautaires est de plus en plus perturbé par la pandémie de coronavirus. Le sommet de jeudi et vendredi a ainsi vu, coup sur coup, le départ de la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, puis de la Première ministre finlandaise, Sanna Marin, qui se sont placées en quarantaine, un membre de leur entourage immédiat ayant été testé positif au Covid-19. Le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, n’a pu faire le voyage de Bruxelles, car il a été en contact avec une personne testée positive juste avant le conseil européen…

Quarantaine

Déjà, le sommet des 24 et 25 septembre avait dû être retardé d'une semaine, le président du Conseil, Charles Michel, ayant dû se placer en quarantaine. Il est d'ailleurs étonnant qu'il ait pris le risque de réunir deux fois à quinze jours d'intervalle un sommet physique des vingt-sept chefs d'Etat et de gouvernement alors que la pandémie connaît un rebond. Autant celui de fin juillet se justifiait, l'adoption du fonds de relance de 750 milliards d'euros et du budget européen pour la période 2021-2027 impliquant des négociations en tête-à-tête, autant les deux sommets d'automne auraient pu se tenir virtuellement, la minceur de leur agenda ne justifiant pas un déplacement des «chefs». Un problème d'ego de Charles Michel, selon de nombreux diplomates.

Ursula von der Leyen, elle, joue décidément de malchance, car c’est la seconde fois qu’elle doit se placer en isolement et sans doute pas la dernière, sa fonction, comme celle de tout le personnel politique d’ailleurs, impliquant un minimum de rencontres physiques.

Le Parlement européen, lui, après avoir repris ses sessions physiques en septembre après six mois d’interruption, a décidé, jeudi, non seulement de ne pas retourner à Strasbourg, mais de se réunir uniquement virtuellement. Pour le personnel des institutions, le télétravail reste aussi la règle comme c’est le cas depuis sept mois, ce qui a permis de limiter la diffusion du virus. Même les journalistes accrédités auprès des institutions voient leur travail bouleversé : la quasi-totalité des conférences de presse se déroule par téléconférence.

Des sommets virtuels

Autant dire qu’il est douteux qu’un sommet physique ait à nouveau lieu avant l’année prochaine. Les Vingt-sept ont d’ailleurs convenu, au cours de leur sommet de jeudi et de vendredi de se réunir chaque semaine, mais virtuellement. Ils ont enfin pris conscience qu’il était nécessaire de coordonner les mesures nationales de lutte contre la pandémie. En effet, on a l’impression que le virus se comporte différemment selon les pays tant les restrictions sont différentes d’un pays à l’autre : quarantaine de sept ou de quatorze jours, masque obligatoire en intérieur et/ou en extérieur, fermeture des bars et restaurants, interdiction de recevoir chez soi et/ou interdiction de sortir dans la rue la nuit, interdiction de voyager, de transporter des instruments de musique, d’aller sur les plages, et ainsi de suite. Cette extrême diversité des politiques sanitaires n’est pas rassurante puisque cela confirme que les gouvernements et les scientifiques n’ont pas la moindre idée de la façon dont le virus se diffuse et qu’ils multiplient des mesures bureaucratiques pour donner l’impression d’agir. Surtout, l’enjeu économique et social devient crucial, un effondrement des sociétés européennes (et donc des systèmes de santé) n’étant dans l’intérêt de personne.