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Interview

«Sans tout l’argent déversé dans le débat public, Trump n’aurait pas existé»

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Pour Nancy MacLean, spécialiste de la droite américaine, la présidence actuelle est, loin d’être un accident, le «fruit d’années de travail d’organisations conservatrices» et l’aboutissement des idées de l’économiste James Buchanan.
A Atlanta, en Géorgie, le 25 octobre. (Photo Elijah Nouvelage. AFP)
publié le 2 novembre 2020 à 19h36

Professeure d'histoire aux Etats-Unis, Nancy MacLean a toujours travaillé sur le conservatisme américain. Son premier ouvrage, Behind the Mask of Chivalry (1994), offrait une analyse surprenante du Ku Klux Klan (KKK). Loin d'être un mouvement irrationnel, MacLean en rappelait la banalité sociale et la rationalité politique. Dans les années 20 et 30, le KKK fonctionnait comme n'importe quelle autre association ou club aux Etats-Unis. Son dernier livre, Democracy in Chains (Penguin, 2017), prolonge cette réflexion aux années récentes et en tire une réflexion sur l'état de la démocratie américaine. Le trumpisme n'est pas un accident, nous dit-elle.

Si personne ne pouvait prévoir le triomphe d'une personnalité aussi fantasque que Donald Trump, le contenu de son programme a été pensé, notamment par un célèbre économiste conservateur, James McGill Buchanan. Mort en 2013, professeur à l'université George-Mason dans l'Etat de Virginie, auteur de l'ouvrage, écrit avec Gordon Tullock, The Calculus of Consent : Logical Foundation of Constititional Democracy (1962), il remporta en 1986 l'équivalent du prix Nobel en économie pour ses travaux sur la théorie des choix publics. Pour avoir mis au jour la pensée anti-démocratique de Buchanan, MacLean a reçu de nombreuses attaques de la part des réseaux conservateurs et d'universitaires l'accusant d'être «complotiste» et de surinterpréter les sources dans un sens présentiste.

Comment avez-vous vécu les années Trump comme universitaire ? Le Président n’a pas ménagé la science, le savoir et les intellectuels…

C’est comme vivre dans une dystopi