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Xinjiang

Travail forcé des Ouïghours : «Ma sœur m’a dit que, désormais, elle “apprenait un métier”»

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Habibula Mohamet, Ouïghour exilé à Istanbul, raconte l’internement de Patigul dans un «camp de rééducation» et sa réapparition dans une usine de textile.
Usine de coton dans la région autonome ouighoure du Xinjiang, le 27 octobre 2019. (Sha Dati/XINHUA-REA/Photo Sha Dati.Xinhua.Réa)
publié le 14 décembre 2020 à 23h02

Habibula Mohamet, 34 ans, dirigeait des ateliers de textile au Xin­jiang quand, en mars 2017, les Ouïghours ayant voyagé à l’étranger ont commencé à être arrêtés sous prétexte de «lutte antiterroriste». Il s’est alors installé à Istanbul avec sa famille. Depuis, ses appartements et son entreprise en Chine ont été spoliés. Sa sœur Patigul, 42 ans, restée à Urumqi, la capitale régionale, travaille sous la ­contrainte après avoir été détenue en camp de rééducation.

Quand avez-vous eu des nouvelles de votre sœur ?

Patigul a disparu en septembre 2018. Durant des mois, je me suis battu pour avoir de ses nouvelles. Je suis allé jusqu'à Ankara pour manifester avec sa photo devant le ­consulat de Chine. Au bout de sept mois, elle m'a ­contacté brièvement, m'a dit qu'elle avait été «en rééducation» et que, désormais, «elle ap­prenait un métier». Puis, en juin 2019, des gens qui la ­connaissaient m'ont fait savoir qu'elle travaillait à l'usine. Depuis, elle m'a laissé deux très courts messages. Enfin, il y a quelques jours, en novembre, elle m'a appelé en ­visio, et m'a expliqué qu'elle coud des perles sur des robes de femmes destinées à l'export vers la Malaisie.

Est-ce qu’elle vous a donné des détails sur ses conditions de travail ?

Elle m'a expliqué que son usine est très grande et que, bien que ce soit dans les environs d'Urumqi, elle est obligée de se nourrir et de dormir en dortoir