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Pourquoi grimpez-vous?

Catherine Destivelle: «Comme attiré par un aimant»

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Une saison à la montagnedossier
Alpinistes, écrivains, guides, sportifs multimédaillés… Quatorze passionnés parlent de leurs montagnes. Le texte de Catherine Destivelle, alpiniste, piolet d’or 2020, éditrice.
destivelle (catherine) (Martin Alex/PRESSE SPORTS)
par Catherine Destivelle, alpiniste, piolet d’or 2020, éditrice
publié le 13 juin 2022 à 9h48

Grimper, pour moi, figure vraiment un formidable jeu tactique. J’aime le rocher; je le considère comme un matériau vivant que je dois essayer de maîtriser. Chaque passage a une âme, avec ses secrets et ses ruses, chaque roche possède son caractère propre. Le calcaire est ravagé, plein d’embrouillaminis, de reliefs désordonnés, le gneiss un peu moins, le grès est différent, plus compact, plus rond. Le granite, lui, est simple, franc, sans détour. Sa matière pure, belle, agréable au toucher est aussi accueillante par ses couleurs généralement chaudes, dans les ocres et les rouges. Ses lignes sont souvent pures, élancées. C’est vraiment lui qui a ma préférence.

A son contact, mon corps n’est plus vraiment maître de lui-même. Comme attiré par un aimant, il ne pense qu’à s’y confronter, qu’à le toucher, puis à chercher une faille ou une faiblesse pour pouvoir jouer avec lui, le deviner. Quoi que je fasse, quelle que soit la façon dont je grimperai les faces et les pics, le roc sera toujours égal à lui-même, aussi fort, aussi puissant. Je serai toujours obligée de me plier à ses exigences, à ses ruses. Et si je veux rester en vie, je dois m’en méfier et le respecter. Lorsque je pense au rocher en général, c’est une image de granite brillant au soleil qui me vient aussitôt à l’esprit. Je m’imagine alors le toucher, le caresser! Tout mon corps se trouve réchauffé par la réverbération du soleil sur la roche. Mes mains se promènent doucement sur la surface granuleuse du rocher. Puis mo