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Tribune

Citoyens et sciences pour la nature en ville

La nature en villedossier
Conférences, débats et rencontres avec des biologistes, écologues, architectes, philosophes ou sociologues… Du 20 au 22 mai à Rouen, la fédération BioGée organise les journées «Naturellement !» en partenariat avec «Libération» pour expliquer et comprendre l’importance de la nature en ville.
BioGée s’est unie à la ville de Rouen et à la Métropole Rouen Normandie pour montrer des sciences du vivant et de la Terre au service d’un avenir meilleur. (Léo Pierre/Hans Lucas)
par Philippe Clergeau, professeur du Muséum national d’Histoire naturelle et Marc-André Selosse, professeur du Muséum national d’Histoire naturelle et président de la Fédération BioGée.
publié le 1er mai 2022 à 18h09
(mis à jour le 1er mai 2022 à 18h09)

Les sciences du vivant et de la Terre expliquent et alertent sur les fléaux actuels (perte de biodiversité, crises sanitaire ou climatique) et courent en cela le risque de devenir aussi détestables que ce dont elles traitent… C’est un paradoxe terrible car, si on s’en saisit à temps, ces disciplines sont un outil pour mieux agir sur notre environnement et notre santé. Hélas, cette promesse reste vaine en raison de l’ignorance des faits et des mécanismes reconnus par les sciences du vivant et de la Terre : faute d’information et de formation à l’école, cette ignorance nous affecte tous, des décideurs jusqu’aux simples citoyens qui sont aussi décideurs de fait dans leurs gestes quotidiens d’aménagement et de consommation.

Nous pourrions mieux faire, dans notre intérêt : c’est ce que défend BioGée, une fédération réunissant le Muséum national d’histoire naturelle, des Académies, des sociétés scientifiques et des associations d’enseignants et de journalistes. C’est pour cette raison que BioGée s’est unie à la ville de Rouen et à la Métropole Rouen Normandie pour montrer des sciences du vivant et de la Terre au service d’un avenir meilleur. Chaque année, les rencontres «Naturellement !» aborderont un aspect de l’utilité des sciences pour les citoyens : du 20 au 22 mai 2022, avec le soutien de Séché Environnement et du Muséum, nous montrerons comment comprendre la nature en ville peut améliorer cette dernière.

De la nature en ville à la ville biodiversitaire

Les études scientifiques montrent en effet tous les avantages de développer une végétalisation de la ville. Les services rendus sont nombreux et la ville ne semble vivable que grâce à la présence de végétaux qui apportent non seulement ambiance et ressourcement mais aussi toute une palette de régulations comme le rafraîchissement de l’air ou la gestion des eaux pluviales. Leur impact positif sur la santé humaine est également maintenant clairement démontré. Tous ces arguments militent pour le développement d’une nature en ville.

Végétaliser la ville est une première étape dans la prise de conscience et la maturation politique. La deuxième étape est de dépasser ce verdissement en développant une biodiversité fonctionnelle, c’est-à-dire un ensemble d’espèces qui ont des relations écologiques entre elles. La prise en compte des processus et des relations écologiques permet de donner une forme de stabilité et une capacité de résilience à l’écosystème ainsi formé. Il s’agira donc de se rapprocher du fonctionnement des écosystèmes spontanés, soit en les protégeant au mieux dans le contexte urbain, soit en créant de nouveaux écosystèmes accueillant espèces horticoles et locales. L’objectif est non seulement de protéger une biodiversité locale et de viser une durabilité, mais aussi d’intégrer plus pleinement la ville dans une écologie régionale.

Cette perspective implique une autre approche de la nature en ville qui jusqu’à maintenant a souvent consisté en un paysagisme déterminé par l’esthétique et la gestion de l’espace. Elle interroge non seulement les plantations et la conduite des parcs et jardins, mais aussi l’architecture (quelle végétalisation pour les bâtiments ?) et l’urbanisme (quelle organisation du bâti et du non-bâti ?). Elle interroge enfin l’organisation future de l’espace public qui doit redevenir un espace à vivre et plus seulement un espace de mobilité.

A Rouen, un laboratoire interdisciplinaire pour la ville nature de demain

De nouvelles stratégies de conception et de construction, et de nouvelles recherches sur les «néo-écosystèmes» sont en cours pour concrétiser ces objectifs. Déjà, plusieurs expériences menées par les collectivités ou des agences d’architecture permettent de s’engager non plus seulement dans un meilleur verdissement de la ville mais vers l’intégration de la biodiversité et des processus écologiques qui la sous-tendent, par exemple en créant des corridors écologiques permettant la dispersion des espèces au sein du tissu urbain.

Cette tribune est le début d’un fil qui, jusqu’au 20 mai, affirmera la perspective constructive de la nature en ville, comme un exemple où les sciences du vivant et de la Terre sont un outil pour l’avenir. Nous cheminerons en associant biologistes, écologues, politiques, architectes, philosophes, sociologues… jusqu’aux journées «Naturellement !», du 20 au 22 mai à Rouen, (qui seront précédées d’un cahier de quatre pages dans Libération le 17 mai). Un événement durant lequel conférences et débats associeront citoyens et spécialistes dont le programme est à retrouvé ici.

Nous vous souhaitons une belle découverte d’un avenir citadin qui passe par notre lien à la nature.