Le 12 juillet, en partenariat avec le Festival d’Avignon et Avignon Université, l’Afdas organisera le premier Forum de l’inclusion économique dans la culture et les industries créatives. «Libération», partenaire de l’événement, publiera sur son site tribunes, reportages et enquêtes sur le sujet.
Les politiques publiques culturelles et d’éducation populaire doivent-elles être construites de concert ? Oui !
Leur tronc commun s’est accru au fil des évolutions sociales et sociétales. D’un côté, le développement des dispositifs d’éducation artistique et culturelle a renouvelé et fortifié la relation des professionnel·le·s et lieux du milieu de l’art avec les publics. De l’autre, les acteurs de l’éducation populaire ont singulièrement renforcé le lien avec les artistes, en multipliant notamment les résidences.
Ainsi, fortes de leur vocation à provoquer l’échange, la rencontre et le partage, culture et éducation populaire confortent leur approche d’émancipation individuelle et collective multidisciplinaire qui vise à permettre à chacun·e d’acquérir connaissances et nouvelles capacités tout au long de la vie, en développant réflexion, esprit critique et champ du sensible. Par ailleurs, chacune à son endroit participe à l’émergence de la création artistique en la soutenant et en la médiatisant sous différentes formes au plus près de tous les publics.
En tout cela, ces politiques publiques, qui concernent les cultures (au sens large du terme) d’une société considérée à l’échelle d’un pays ou d’une collectivité, relèvent du domaine socioculturel – terme étrangement rejeté par certaines institutions. Un domaine où les professionnel·le·s – artistes, acteurs associatifs, travailleurs sociaux, élu·e·s – ne se substituent pas les uns aux autres mais œuvrent dans une nécessaire complémentarité. Où ils construisent ensemble leurs orientations sur une analyse fine et régulièrement interrogée de la réalité sociale du territoire. Non pas pour différencier les propositions en fonction de ce que serait supposé aimer ou accepter tel groupe ou tel autre, mais pour dispenser la totalité des propositions à l’ensemble des groupes, en insistant davantage là où les difficultés sont plus nombreuses.
Las ! L’enfer est pavé de bonnes intentions. Par trop de cloisonnements des dispositifs et des financements, mais également par des erreurs de jugement, les offres en direction des publics de centre-ville et des quartiers populaires sont souvent différenciées.
En schématisant : au centre-ville les projets émanant directement de la «Culture», aux quartiers populaires ceux liés à la politique de la ville. Or dans ces domaines, la symbolique revêt une importance particulière, et peut sensiblement influencer le regard que portent sur eux leurs potentiels usagers, ainsi que le jugement des acteurs culturels et des élu·e·s. Dans son ouvrage sur «les manières de lire à l’école et dans les familles», le professeur en sciences de l’éducation Stéphane Bonnéry pointe les idées erronées de l’institution sur les pratiques «électorales» des familles populaires. Il remarque que dans les établissements de REP, sont privilégiés les livres et albums «explicites» qui délivrent «au lecteur l’essentiel de ce qui est nécessaire pour accéder au sens principal de l’histoire», tandis que les ouvrages «complexes» sont majoritairement présentés hors REP. Les politiques publiques dérivent souvent de la même façon et pour les mêmes raisons, présentant en centre-ville des projets aux thématiques et esthétiques diversifiées et dans les quartiers populaires, une palette resserrée, construite d’après ce que l’institution suppose intéresser ou être bénéfique pour les publics concernés.
Or, le sujet n’est pas de discriminer les contenus en fonction des publics, mais d’en diversifier la médiatisation, l’accompagnement. A défaut, influencées par des présupposés inconsciemment intégrés, nos politiques finiront par avoir l’effet inverse de ce pour quoi elles militent, à savoir l’assignation à des pratiques, des goûts, des désirs présumés qui conduisent les publics populaires à des horizons culturels fermés et obèrent la possibilité d’un vivre ensemble partagé.
Seule une réflexion collective des acteurs de la culture et de l’éducation populaire, autour du tronc commun de leurs missions et fondée sur leurs compétences spécifiques, permettra de construire un projet politique ambitieux, porteur d’égalité et de partage, à destination de l’ensemble des publics.