Sobriété, vivant, climat, croissance, biodiversité… du 26 au 30 septembre, le Festival des solutions écologiques 2022 proposera débats, documentaires et rencontres dans cinq villes de Bourgogne-Franche-Comté. Un programme réalisé en partenariat avec Libération.
S‘il est sorti en salles en septembre 2021, Une fois que tu sais, le film documentaire d’Emmanuel Cappellin, est plus que jamais d’actualité. Dans le cadre du Festival des solutions écologiques, le réalisateur présente son long-métrage ce lundi à Tournus, avant un échange avec le public.
Le film, intime, démarre par le bilan de son enfance, étrangère aux dangers que les jeunes générations connaissent aujourd’hui. Après un passage aux Etats-Unis où il étudie les sciences de l’environnement, il explique avoir plongé dans une inquiétude profonde quant à l’avenir de la planète et de ceux qui la peuplent. La lecture du rapport de Dennis Meadows, les Limites à la croissance, publié en 1972, est l’élément déclencheur. Pour la première fois, il entend le mot «effondrement» et comprend ce qui est en train de se jouer. Démarre alors une série de voyages à travers le globe sous forme de quête identitaire, pour finalement trouver refuge dans un village de la Drôme d’où il tente de trouver des réponses à ses questions.
Si Emmanuel Cappellin déroule le fil de ses pensées, il laisse surtout la parole à des scientifiques internationaux triés sur le volet. A commencer par Jean-Marc Jancovici, grande figure médiatique spécialiste des questions d’énergie, au discours tranché. Pour l’ingénieur et conférencier, l’humain doit désormais «apprendre à vivre dans un univers contraint» où l’entraide doit prévaloir. Selon Pablo Servigne, inventeur du terme «collapsologie», l’action commune doit être absolue, peu importe la suite des événements : «Il faut tout mettre, tout donner, même si ça foire», lance-t-il à une foule d’habitants anxieux. Au Bangladesh, le cinéaste filme le chercheur membre du Giec Saleemul Huq, et la manière dont le peuple a su s’adapter aux bouleversements climatiques qui transforment le pays.
Le documentaire glisse ensuite vers un récit plus philosophique, avec l’intervention du journaliste américain Richard Heinberg qui, ému aux larmes, se demande s’il vaudrait mieux ne rien savoir, parce qu’«Une fois que tu sais, tu ne peux plus être le même». La géographe Susanne Moser affiche de son côté une résilience à toute épreuve : «J’accepte l’incertitude, j’accepte l’inconnu, et repars faire ce qui me semble juste.» Au-delà de la tonalité dramatique, le film d’Emmanuel Cappellin met en avant des personnalités combatives, qui agissent avec une conviction acharnée, ouvrant le champ des possibles. Nous lui avons posé trois questions.
Quelles ont été les réactions à la sortie du film ?
Je voulais raconter quelque chose d’émotionnellement honnête, et les gens sortent du film avec des ressentis différents. Ceux qui sont très au courant de ces sujets se retrouvent dans l’histoire racontée et les questions posées, et pour ceux qui n’ont pas conscience de l’effet domino, le film offre une autre perspective. Je suis encore en plein dedans, il a été traduit dans 17 langues.
Quelle est la prochaine étape ?
Avec l’association Terractiva, nous avons créé «Racines de résilience», une plateforme qui recense, sous forme d’arbre, des actions autour du climat selon trois thématiques : «construire», «s’interposer» et «régénérer». L’idée est que ce projet s’internationalise et que les gens puissent l’utiliser sur tous les territoires. Je voudrais aussi que le film devienne un outil de sensibilisation pour les entreprises, les actions militantes ou les institutions. Les problèmes sociaux et écologiques vont converger de manière violente, et en même temps c’est source d’espoir parce que ça va faire naître de nouvelles alliances.
Qu’attendez-vous de la projection au Festival des solutions écologiques ?
Je suis surtout impatient de participer à l’atelier d’éducation aux médias qui la précède. Ça me permet de revenir à mes premières amours puisque j’ai aussi été éducateur environnement dans les collèges et lycées. A cet âge-là, on a besoin d’adultes qui disent la vérité, parce que dans la cour de récréation, ils en parlent. Je veux leur faire comprendre que leur réalité est une aventure même si c’est aussi terrifiant. Il faut réimaginer la façon de vivre ensemble.