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Au bonheur des mômes: Handicap

«Faire réfléchir les enfants sans toujours être dans des choses sombres»

Festival Au Bonheur des Mômesdossier
La totalité des représentations du Bonheur des mômes sont accessibles aux personnes atteintes de handicaps, et les équipes du festival ont été formées à leur accueil.
Le festival Au bonheur des mômes, au Grand Bornand, en 2019. (Pierre Witt/Hemis/AFP)
par Maïté Darnault, correspondante à Lyon
publié le 12 juillet 2022 à 11h15
Le festival «Au Bonheur des mômes» du Grand-Bornand fêtera du 21 au 26 août son trentième anniversaire. Partenaire de l’événement mêlant écologie, culture et engagement citoyen, Libération publiera tout l’été articles, interviews et tribunes sur les thématiques phares du rendez-vous savoyard.

Sortir de chez soi, parcourir quelques mètres sur un trottoir pour aller jusqu’à une boîte aux lettres et poster son enveloppe avant de rentrer. Ces actes du quotidien peuvent se transformer en parcours du combattant dès lors qu’on est en fauteuil roulant. «Franchir du gravier, monter une rampe, contourner un lampadaire, une crotte de chien, une poubelle ou un vélo, se hisser jusqu’à la boîte parfois un peu trop haute… tous ces détails peuvent paraître insignifiants pour les valides, mais ce sont vraiment des défis pour les personnes en fauteuil roulant», rappelle Matthis Camer, fondateur de Tourgether. Cette association belge, partenaire de longue date du festival Bonheur des mômes, sera présente au Grand-Bornand (Haute-Savoie), pour la trentième édition de la manifestation (1).

Matthis Camer a créé Tourgether afin de proposer des sessions de handiski à des personnes porteuses de handicap moteur. Ce Bruxellois connaît bien le village du Grand-Bornand et ses sommets alentour : depuis qu’il est gamin, il vient y skier l’hiver et profiter, l’été, du festival et de ses coulisses. Car sa mère fait partie de la troupe qui conçoit, depuis les débuts de l’événement, ses décors un peu dingues – un collectif logiquement surnommé, en ces alpages, la «Belgerie».

«Ce cadre festif, atout pour engendrer une sensibilisation»

«Super attaché» au Bonheur des mômes et à la liberté qu’il y a découvert enfant, Matthis Camer, devenu assistant social avant de se reconvertir dans la charpenterie, a eu l’idée de proposer ce «Parcours la différence» en fauteuil roulant : «On a voulu profiter de cette atmosphère ludique pour créer ce projet qui a du sens, explique le trentenaire. Ce cadre festif est un atout pour engendrer une sensibilisation, ça reste une animation mais elle permet de toucher le jeune public, on porte un message en cohérence avec les valeurs du festival.» En effet, la totalité des représentations du Bonheur des mômes sont accessibles aux personnes atteintes de troubles mentaux et moteurs, et les équipes du festival ont été formées à leur accueil.

Matthis Camer a voulu prolonger cet engagement en permettant à des enfants âgés de 7 à 12 ans cette immersion sous forme de déambulation, afin qu’ils envisagent différemment la mobilité et la vie quotidienne des personnes handicapées. «On fait d’abord tester le fauteuil roulant aux festivaliers, on leur explique le fonctionnement basique, puis on leur donne une carte postale sur laquelle ils écrivent le message qu’ils veulent et ils doivent la poster en fin de parcours, pendant lequel ils sont suivis par un accompagnateur», détaille Matthis Camer, pour qui la réussite de cette animation réside dans sa capacité à «faire réfléchir les enfants sans toujours être dans des choses sombres».

A la fin du parcours, chaque jeune est reçu pour un court entretien individuel. Un debrief primordial afin que l’enfant puisse partager et mettre des mots sur son expérience : «Notre philosophie, c’est d’essayer de faire comprendre que la notion de handicap est très liée à l’environnement direct, estime Matthis Camer. Cela part d’une déficience mais ça ne s’arrête pas là. Le handicap est renforcé par les difficultés d’accès, les inégalités économiques et sociales. Le défi, c’est de se dire qu’un certain nombre de choses pourraient ne pas être handicapantes si elles avaient été pensées différemment.»

Festival Au bonheur des mômes, du 21 au 26 août au Grand-Bornand. Rens.: Legrandbornand.com