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Le procès du siècle : BD

Jean-Marc Rochette : il y a comme un loup...

Le procès du siècle, délibérations citoyennesdossier
Amoureux de la montagne et des espaces sauvages, le dessinateur français a consacré un bel album à l’animal.
Un extrait de la bande-dessinée de Jean-Marc Rochette (éd. Casterman). (Ed. Casterman/Ed. Casterman)
par Didier Arnaud et Lazare Burg
publié le 16 décembre 2021 à 16h00
(mis à jour le 16 décembre 2021 à 16h15)

Jean-Marc Rochette est connu pour ses bandes dessinées, dont la série Transperceneige. Avant ses peintures ou ses dessins, il exerçait beaucoup en alpiniste solitaire (1). Lorsqu’il avait environ 17 ans, le dessinateur s’amusait à escalader des montagnes sans corde d’assurance, à la seule force de ses bras et de ses crampons. Il adorait cette discipline. Son moment préféré était lorsqu’il arrivait au sommet et voyait le soleil se lever devant lui. Un instant tellement impressionnant qu’il l’a dessiné dans sa BD Aile froide, qui raconte son amour des montagnes. Il avait écrit, avec cette image, «je prends feu», tant les rayons du soleil lui donnaient l’impression de vraiment s’embraser. Au sommet, il n’y avait plus rien pour le séparer de l’astre brillant. Une passion qui eut pour conséquence de le rapprocher de cette nature qu’il appréciait tant.

En 1976, âgé de 20 ans, Jean-Marc Rochette se prit une pierre en pleine tête alors qu’il descendait en rappel. Il fut hospitalisé et s’il s’en remit, son visage resta très touché. Après cet accident, il fit une dernière grosse saison d’alpinisme puis dut s’arrêter. Son corps ne voulait plus qu’il risque ainsi sa vie tous les jours. Il se mit alors en quête d’une nouvelle passion, moins dangereuse : la BD.

«Le loup est à l’opposé de la société ultra calibrée»

En 1978, il arrête les études pour se concentrer sur l’écriture et le dessin. Il réalise rapidement ses premiers albums : Edmond le cochon et le Transperceneige. Il continue à publier des BD et en illustre certaines, dont une Odyssée à l’aquarelle. Il se met également peindre et à sculpter et s’y consacre exclusivement de 2009 à 2016 lors de son séjour à Berlin faisant une pause dans ses travaux de BD.

A son retour d’Allemagne, Jean-Marc Rochette décide de se concentrer sur la nature et l’alpinisme. En 2018 il publie Aile froide, (Casterman), une autobiographie dans laquelle il raconte ses aventures d’alpinistes dont cette blessure qui l’a beaucoup marqué. L’année d’après, ce sera le Loup, (Casterman), une BD racontant l’histoire d’un jeune louveteau dont la mère a été tuée par un berger sous ses propres yeux. Le livre montre toute la vie de l’animal qui va chercher à se venger à plusieurs reprises du berger. Il y a deux ans, rencontré à Albertville lors du festival du Grand Bivouac, il nous racontait : «Le loup ne connaît pas les frontières, la propriété. Il est à l’opposé de la société ultra-calibrée. C’est un animal tribal, il s’oppose à l’humain, pour lui, la propriété c’est le vol. […] Le loup pose un problème ontologique et philosophique. Est-ce que la nature appartient à l’homme ? Le loup est le symbole de cela : la nature n’appartient pas à l’homme.»

(1) Jean-Marc Rochette était l’invité du Collège de France le 24 novembre à l’occasion d’un cycle de conférences consacré aux auteurs de bande dessinée.

Espace de débats pour interroger les changements du monde, le Procès du siècle se tient chaque lundi à l’auditorium du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, à Marseille. Libération, partenaire de l’événement, proposera jusqu’en mars, articles, interviews et tribunes sur les thèmes évoqués. A retrouver ici. Informations et réservations sur le site du Musée.