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Environnement

Le sol, richesse méconnue, sans cesse piétinée

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Les conférences de la Cité des sciences et de l’industriedossier
Des milliers de nouvelles espèces de champignons, de bactéries ou amibes ont été découvertes sous nos pieds. Pour préserver cette présence invisible, il faut repenser les pratiques agricoles qui ignorent trop souvent cette dynamique vivante et contribuent au réchauffement global.
«Les racines de 90 % des plantes s’associent à des champignons du sol en une coopération appelée mycorhize.» (Jamie Grill/Plainpicture)
par Marc-André Selosse, Professeur du Muséum national d’histoire naturelle à Paris et aux universités de Gdansk (Pologne) et Kunming (Chine), membre de l’Académie d’agriculture de France
publié le 6 octobre 2021 à 1h06
(mis à jour le 7 avril 2022 à 17h47)
«Libération», partenaire du cycle de conférences «les Nourritures» (février – juin 2022) organisé par la Cité des sciences et de l’industrie, proposera régulièrement articles, interviews et tribunes sur les sujets abordés. A suivre le 12 avril à 19 heures, la conférence «Comment le sol façonne notre monde ?» par Marc-André Selosse. Accès gratuit. Rendez-vous à l’auditorium de la Cité des sciences et de l’industrie ou sur cite-sciences.fr.
Article initialement paru le 6 octobre 2021

Qu’est-ce qui comporte 25 % de la biodiversité connue et 75 % de la biomasse terrestre, construit la fertilité du monde, régule le cours des rivières et le climat ? Ne cherchez pas loin, juste sous vos pieds : c’est le sol !

Longtemps, il a été vu comme un support des végétaux ou de nos constructions, nourrissant chimiquement les plantes : en accord avec cela, l’agriculture conventionnelle y met des engrais minéraux. On lui portait peu d’attention : réputé sale, peut-être parce qu’on y met nos morts, il est opaque et fait de composants invisibles, minéraux (comme les argiles) ou vivants (les microbes, bactéries et champignons). L’essor actuel de la microbiologie moléculaire et l’automatisation du séquençage génétique, qui identifie les espèces et leur métabolisme par l’ADN, ont été une révolution.

Un monde microbien pesant 5 à 10 tonnes par hectare

Des milliers de nouvelles espèces de champignons, de bactéries et de prédateurs unicellulaires comme les amibes ont été découvertes dans le sol. Au-delà des iconiques vers de terre, un monde microbien pesant 5 à 10 tonnes par hectare vit sous nos pieds ! La «géosmine», la substance qui donne à la terre son odeur caractéristique, est d’ailleurs un produit bactérien.

Cette biodiversité fait vivre le sol. La matière organique morte qui tombe au sol est décomposée par des microbes qui s’en nourrissent. Au passage, ils en restituent le carbone (sous forme de CO2), l’azote (sous forme de nitrates) ou le phosphore (sous forme de phosphates) qui pourront à nouveau nourrir les plantes. Pasteur