«Tout ce qui dégrade la culture raccourcit les chemins qui mènent vers la servitude», disait Albert Camus : loin de moi l’idée de banaliser la déstabilisation des industries culturelles et créatives affaiblies par la Covid-19. Mais de cette crise peut sortir une transformation positive : une des réponses à la crise, c’est la diversité culturelle et l’inclusion économique.
Les success-stories d’un Jamel Debbouze ou d’une Zahia Ziouani ne doivent pas cacher les affres d’un secteur miné par une sorte d’autarcie larvée. Pour un Ladj Ly célébré à Cannes combien de créateurs issus de nos banlieues en panne d’opportunités ? Les métiers de la culture étendus à l’édition et aux médias se singularisent par une opacité de recrutement favorisant les insiders. Les postes les plus attractifs, correctement rémunérés dans un milieu de plus en plus précarisé se proposent au cours de rendez-vous informels. Au regard des programmes d’égalité des chances menés depuis des années par des organisations comme la Fondation Culture et Diversité pour permettre à des jeunes issus de milieux modestes d’accéder aux opportunités du secteur, un mot me vient : injustice !
Et urgence…
Urgence à mettre le secteur en accord avec la réalité de la société française. Notre richesse humaine est bien vivante. Notre terreau culturel, énorme. Mais cette diversité est sous-exploitée. A tort, notamment pour notre rayonnement à l’international. Là où l’entre-soi rétrécit le champ de la création, l’inclusion ouvre les horizons par sa capacité à générer de nouvelles idées, à inventer de nouvelles écritures et à forger de nouveaux mythes. La question fait débat. Mais le lien entre diversité dans une industrie comme le jeu vidéo et une plus grande empathie envers les utilisateurs entraînant la création de meilleurs produits a été établi.
Urgence à transformer les organisations publiques comme privées. Créer des environnements fertiles, porteurs de sens et de performance ne se décrète pas. Cette volonté nécessite d’installer une culture d’entreprise nourrie par la diversité et l’inclusion économique. Et donc de prendre des actes. Parmi eux, davantage de nominations dans les établissements publics ou de soutien aux porteurs de projets. L’effet levier de l’audiovisuel public pourrait ainsi mieux servir à la promotion et à la mise en valeur de créateurs issus de la diversité.
Urgence à s’allier. Car se la production à la diffusion, c’est l’ensemble de la chaîne de valeur qui doit être irriguée par cette nouvelle approche. Elle nécessite un travail collectif. Pourquoi ne pas créer sous l’impulsion de l’Afdas une coalition d’acteurs associatifs, professionnels, publics et privés au service de l’inclusion ? La Fondation Mozaïk est prête, avec d’autres, à prendre sa part.
Les industries créatives et culturelles ont l’extraordinaire faculté de pouvoir réparer, apaiser une société fracturée. C’est possible. Nous avons les ressources disponibles. Le talent c’est comme l’émotion : il ne souffre d’aucune barrière.