Joan Baez et Bob Dylan, Fidel Castro et Che Guevara, Adam et Eve, le Petit Prince et le renard… Tout l’été, Libé vous raconte la magie des premiers instants. Pour le meilleur ou pour le pire.
Dans le delta du Mississippi, la nuit est vaste, poussiéreuse. En cette soirée des années 30, la brise fait-elle bruisser les cyprès chauves ? Entend-on les grattements des opossums ou les trilles des engoulevents ? Quelque part à Rosedale, ou peut-être à Clarksdale, tout à côté d’une plantation, un jeune homme s’arrête pour demander au diable de lui accorder sa guitare. Ils se sont donné rendez-vous au croisement de deux routes, à un de ces carrefours où le mystique se fait palpable, où les possibles se multiplient. Pour sceller son pacte, le diable a pris la forme d’un homme, noir et immense. Le musicien reprend son instrument et part vagabonder vers son destin. Il ne lui reste que quelques années à vivre.
Ceux qui revoient Robert Johnson après cette soirée le trouvent changé. Son jeu est transfiguré, et la trentaine de chansons qu’il enregistre alors inspireront des générations de bluesmen qui défileront dans les studios des frères Chess, au 2120 South Michigan Avenue, à Chicago. Quand Johnson s’éteint en 1938 à 27 ans, dans des circonstances mystérieuses où se mêlent alco