Gagner son bifteck, se taper la cloche, avoir les dents du fond qui baignent… Autant d’expressions qu’on a pu savourer çà et là dans les films de Michel Audiard ou dans de la série noire. Séduisante sous ses airs canailles, la cuisine dans l’argot n’en reste pas moins sordide.
«Il y a toujours un double-fond», explique Marcelle Ratafia, spécialiste de la langue verte. Elle s’est sérieusement amusée à recenser 150 drôles d’expressions de la cuisine, aux éditions Le Robert, paru en 2021. De faire l’andouille à verser un pot-de-vin, 80% d’entre elles ont des origines argotiques. A force de décortication, le bilan est sulfureux : la cuisine de l’argot parle ou de sexe ou d’argent : «Même une expression innocemment utilisée aujourd’hui comme mettre du beurre dans les épinards signifie apporter un peu d’argent supplémentaire en se livrant à une prostitution occasionnelle, en argot dans le texte.»
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L’usage de fruits et de légumes n’est jamais neutre : aller aux fraises, c’est chercher un endroit tranquille pour tirer son coup tandis qu’aller aux asperges, c’est faire le tapin «rapport aux longues jambes que représentent les asperges», glisse Marcelle. Dans la chanson les Nuits d’une demoiselle, Colette Renard fait son marché sur la place de l’argot : «Je me fais ramoner l’abricot», «je me fais grossir la cerise», elle aurait pu ajouter quelques framboises, une myrtille et même un haricot, autant de synonymes pour renvoyer au sexe féminin. L’