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Libération
Une histoire peut en cacher une autre (34/36)

Mélinée Manouchian, l’être d’amour

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Avant d’être fusillé en 1944, le résistant Missak Manouchian a rédigé une missive d’adieu bouleversante à son épouse, Mélinée, qui a passé le reste de sa vie à honorer dans l’ombre la mémoire et les combats de son mari.
Mélinée Manouchian, née Mélinée Assadourian en 1913 à Istanbul, morte le 6 décembre 1989 à Paris, est issue d'une famille de fonctionnaires de l'Empire ottoman. Après la guerre, elle écrit un livre sur Missak Manouchian, le premier qui lui ait été consacré, publié en 1954 et réédité dans les années 1970. En 1985, elle participe avec Serge Mosco et Charles Mitzflicker à la réalisation du film Des terroristes à la retraite, qui est à l'origine de « l'Affaire Manouchian », due à la mise en cause de la responsabilité de dirigeants du PCF dans la destruction du groupe Manouchian. Portrait de Mélinée Manouchian à l'occasion de la sortie du film "Des terroristes à la retraite", à Paris, le 13 juin 1985. (Philippe Ledru/akg-images)
publié le 24 août 2022 à 16h55

Tous les épisodes de notre série de l’été 2022, «Une histoire peut en cacher une autre», à retrouver ici.

Peut-on être l’ombre d’une ombre ? Refaire sa vie tout en passant à côté d’elle ? Et, sans avoir eu d’enfant, donner naissance à un mythe ? Pour qui a eu la chance d’avoir un prof de musique communiste au collège, Mélinée Manouchian (1913-1989) est une fulgurance, politique et romanesque, magnifiée par les vers d’Aragon et la voix de Ferré célébrant les héros de «l’Affiche rouge», ces résistants apatrides dirigés par un Arménien, Missak Manouchian, et désignés à la vindicte par les nazis. Des «amoureux de vivre à en mourir», salue le poète qui reprend les derniers mots de Manouchian écrits à son épouse avant d’être assassiné par les nazis en février 1944. «Ma petite Mélinée, ma petite orpheline bien-aimée, écrit celui qui signe de son prénom français, Michel. Dans quelques heures je ne serai plus de ce monde […]. Cela m’arrive comme un accident dans ma vie, je n’y crois pas mais je sais que je ne te verrai plus jamais.» Depuis sa cellule de la prison de Fresnes, il intime à son âme sœur d’être heureuse, de se remarier «sans faute» et, surtout, d’avoir un enfant : «Bonheur à ceux qui vont survivre