Republication
Publié lors de la série d'été 2022 «Une histoire peut en cacher une autre», nous republions cet article à l'occasion de l'entrée au Panthéon de Missak et Mélinée Manouchian, le 21 février 2024.
A l’hiver 1944, «les murs de nos villes» se remplissent de rouge. Ni trace de sang ni peinture indélébile. Une simple affiche, reproduite à des milliers d’exemplaires et placardées dans les rues de Paris. Le visage de dix hommes, tous d’origine étrangère, apparaît. Leurs «noms sont difficiles à prononcer» et «nul ne semblait les voir Français de préférence», chantera Léo Ferré quelques années plus tard avec les mots d’Aragon. «L’Affiche rouge», instrument de propagande xénophobe au service du régime hitlérien, désigne à la vindicte celles et ceux – français ou étrangers – qui ont défendu la France dans ses pires heures. Et notamment le groupe Manouchian.
Car, au même moment, s’ouvre à Paris un grand procès, qui a pour but de juger les combattants FTP-MOI (Francs-tireurs partisans-Main d’œuvre immigrée). Vingt-quatre accusés, qualifiés de «terroristes» par les nazis car à la tête d’une supposée «armée du crime», sont convoqués à la barre de la cour martiale. Parmi eux, le plus connu, celui qui donna son nom au groupe donc : Missak Manouchian. L’homme multiplie les casquettes : ouvrier, militant communiste, poète, journaliste, rescapé du génocide arménien… Le 15 février 1944, il eût cette phrase terrible et cruelle de vérité : «Vous avez hérité de la nationalité française, nous, nous l’avons méritée.» Du courage, Manouchian et ses camarades n’en ont pas manqué. On ne compte plus le nombre d’actions menées entre le début de l’année 1942