«Au pont de La Saussaz, à 1 300 mètres de la gare de Saint-Michel-de-Maurienne, la mort est montée en marche dans le train de Noël.» «Un enchevêtrement de ferraille», «Un train fou qui roule à 130 kilomètres heure», «Tragique destin d’un convoi de permissionnaires» (1). Voilà pour les couvertures de journaux de l’époque. Le 12 décembre 1917, il est 23h15. Un convoi de 17 voitures transporte un millier de soldats de retour du front italien. 425 d’entre eux ne survivront pas.
«C’est un déraillement de train qui a sombré dans l’oubli», raconte l’historien André Pallatier, qui a consacré un livre à l’affaire (2). Les raisons ? «La vérité a été tue par la censure.» Car la justice civile, initialement chargée du dossier, a confié l’affaire à la justice militaire «qui a décidé que l’accident relevait du secret-défense. On ne saura donc jamais trop ce qui s’était passé, explique l’universitaire. Les documents d’origine civile, les rapports du PLM [la Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée, ndlr], le rapport d’enquête… tout est devenu propriété de l’armée. Et personne n’a mis son nez dans les archives de la justice militaire». La France ne s’émeut guère. Il faut dire qu’un an après la boucherie de Verdun, la mort de quelques centaines de soldats supplémentaires n’est une priorité pour personne…
«Phénomène de luge»
Parce qu’il fallait des coupables, six cheminots sont mis en accusation et passent en conseil de guerre