Et de dix-huit ! Élisabeth Borne a surmonté une nouvelle motion de censure ce vendredi 29 septembre en soirée à l’Assemblée. La 18e, donc contre son gouvernement, depuis son arrivée à Matignon. Elle a recueilli 193 voix sur les 289 nécessaires pour faire tomber le gouvernement, une issue sans surprise en l’absence de soutien des LR.
C’est l’alliance de gauche Nupes qui a déposé cette motion, après l’activation mercredi dans la soirée par la Première ministre du premier 49.3 de la saison pour faire adopter sans vote le projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027. Le rejet de la motion de censure vaut adoption en nouvelle lecture du projet de loi, transmis au Sénat.
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Cet épisode augure de rudes batailles parlementaires dans les semaines à venir. Le gouvernement devrait avoir recours à cette arme constitutionnelle contestée une dizaine d’autres fois au cours de l’automne pour faire adopter les budgets de l’État et de la Sécurité sociale car il ne dispose que d’une majorité relative à l’Assemblée nationale.
«Un gouvernement qui est 49.3 dépendant»
Le débat sur la motion de censure a eu lieu en fin de soirée. La gauche a contesté la «cure d’austérité voulue par le gouvernement». «On a un gouvernement qui est 49.3 dépendant», a dénoncé le chef du groupe socialiste Boris Vallaud, dont le collègue Philippe Brun a présenté la motion de gauche.
«Ce n’est pas seulement la brutalité du 49.3, c’est aussi la brutalité de ce qu’il y a dedans», a accusé la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot vendredi sur Sud Radio. «C’est la pire trajectoire d’austérité que notre pays aura vécue, puisqu’on nous propose de faire 70 milliards d’économies d’ici à 2027», a-t-elle détaillé.
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Le Rassemblement national (RN) a soutenu la motion de censure de gauche, en reprochant à Élisabeth Borne de «brutaliser la démocratie» pour «satisfaire la Commission européenne». Le député RN Sébastien Chenu a justifié vendredi sur France Info la décision de son groupe de ne pas déposer sa propre motion : «On se réserve (pour) le budget en lui-même». De fait, la censure n’avait guère de chance de passer, puisque le président des députés Les Républicains (LR), Olivier Marleix, a fait savoir jeudi que son groupe ne la voterait pas.
Pour Yaël Braun-Pivet, il « n’y a pas à diaboliser » le 49.3
Le projet de loi de programmation des finances publiques, rejeté par l’Assemblée nationale il y a un an, doit servir de feuille de route pour la trajectoire budgétaire française de 2023 à 2027. Il prévoit notamment de ramener le déficit public de 4,8 % du produit intérieur brut (PIB) en 2022 à 2,7 % en 2027, sous l’objectif européen de 3 %, dans un contexte où la charge de la dette explose. Dans la version du texte soumise au 49.3, le gouvernement a rétabli un article, rejeté en commission, visant à faire contribuer les collectivités locales à l’effort, par une trajectoire de baisse des dépenses de fonctionnement.
L’exécutif tient particulièrement à cette loi qui conditionne, affirme-t-il, le versement par Bruxelles à la France de 17,8 milliards d’euros sur la période 2023-2024, un argument que conteste la gauche. Mais pas la droite : «Clairement, le pays a besoin de ces 17 milliards d’euros», a estimé Olivier Marleix (LR). «Nous avons besoin de cette loi de programmation […]. Nous ne pouvons pas prendre le moindre risque», avait aussi martelé Élisabeth Borne mercredi à l’Assemblée.
La dernière fois, il s’agissait de faire passer sans vote la réforme des retraites dans une atmosphère de crise sociale et politique. Une motion de censure trans-partisane avait alors été repoussée de justesse, à neuf voix près. Dans le camp présidentiel, le rapporteur du budget Jean-René Cazeneuve (Renaissance) dénonce la coalition de groupes «diamétralement opposés» qui «s’allient uniquement pour battre le gouvernement». Les macronistes s’emploient à banaliser au 49.3. «Un outil comme un autre» en cas «d’obstruction» ou de «majorité relative», «il n’y a pas à le diaboliser», a souligné la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet.