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A l’Assemblée nationale, la loi sur l’avenir énergétique de la France promet des débats sous haute tension

Relance du nucléaire, développement des énergies renouvelables et baisse de la consommation : les députés débattent de l’avenir énergétique de la France ce lundi 16 juin. Un sujet qui divise largement l’hémicycle.
En séance publique, les macronistes tenteront de réintroduire la relance du nucléaire, rejeté en commission. (Xose Bouzas/Hans Lucas.AFP)
publié le 16 juin 2025 à 17h15

Les débats risquent d’être explosifs. Voté au Sénat en octobre, le texte sur «la programmation nationale et la simplification normative dans le secteur économique de l’énergie» du sénateur LR Daniel Gremillet débarque à l’Assemblée nationale ce lundi 16 juin. Une proposition de loi qui vise à définir les grands axes de la politique énergétique de la France, à défaut de pouvoir compter sur la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) des dix prochaines années, que le gouvernement doit rendre depuis deux ans.

Si le texte du Sénat devait relancer le nucléaire, la commission de l’Assemblée nationale a complètement détricoté cette ambition en rejetant l’article 3 qui visait à «tendre vers 27 gigawatts de nouvelles capacités installées de production d’électricité d’origine nucléaire», au grand désespoir de l’ancien ministre de l’Economie et rapporteur du texte Antoine Armand. Il tentera de rétablir cet article en séance publique, probablement soutenu par la droite et l’extrême droite : le RN propose par exemple la construction de nouvelles capacités nucléaires permettant de produire 70 GW d’électricité, quand la capacité de la France n’est que de 63 GW.

De son côté, Antoine Armand souhaite la construction de 14 nouveaux EPR au plus tard en 2030. Une relance dénoncée par les Ecologistes et LFI. «On ne va jamais voter un article 3 avec du nouveau nucléaire, c’est impossible pour nous», affirme à Libé l’écolo Julie Laernoes. Malgré une majorité théorique en faveur du nucléaire, la députée ne désespère pas. «Je rappelle juste que la mobilisation dans l’hémicycle des députés EPR laisse clairement à désirer», glisse-t-elle.

Décarbonée ou renouvelable ?

Alors que son groupe est fermement opposé au nucléaire, elle ne demande pas son arrêt, mais seulement le maintien du parc actuel. «On n’a pas la capacité à fermer de manière sèche le nucléaire aujourd’hui», regrette Julie Laernoes. A la place, elle propose de donner au renouvelable une part bien plus importante dans le mix énergétique français. De l’éolien marin aux panneaux photovoltaïques, le groupe de gauche a multiplié les amendements dans ce sens, contrairement au RN. A l’instar de son député Maxime Amblard, qui souhaite «mobiliser temporairement les ressources fossiles nationales comme levier de transition», le groupe d’extrême droite multiplie les amendements en faveur du nucléaire, de l’hydrogène et, à une moindre mesure, des hydrocarbures, au détriment des énergies renouvelables.

Le texte fixe également l’objectif de porter la part d’énergie «décarbonée» à 58 % de la consommation totale en 2030. Un objectif qui prend donc en compte le nucléaire. «On peut le considérer comme une énergie verte, affirme le rapporteur du texte, Jean-Marie Fiévet (Renaissance) à Libération. Les déchets sont évidemment un sujet mais, aujourd’hui, la France les gère bien, je ne pense pas que ce soit un problème.» «La question des déchets est le problème dont toute la filière ne parle pas, s’agace Julie Laernoes, on se retrouve avec des déchets nucléaires à profusion, on ne sait pas les recycler et on veut en rajouter ?» A la place, l’élue verte propose un quota d’énergie renouvelable de 44 % de la consommation finale brute d’énergie en 2030. Un quota dont est évidemment exclu le nucléaire.

Outre les questions de consommation, ce texte est aussi un outil pour faire passer des réformes politiques dans le domaine énergétique. Alors que la gauche portait un projet de nationalisation d’EDF en 2023, les insoumis veulent se servir de ce texte pour revenir à la charge. Par un amendement de Clémence Guetté, LFI propose de transformer EDF en établissement public à caractère industriel et commercial (Epic). Alors qu’elle a fait adopter un amendement pour rétablir les tarifs réglementés de vente de gaz, elle avait déjà tenté de faire voter un projet de loi allant dans ce sens en 2023, lors de sa niche parlementaire. Le vote solennel du texte est prévu le 24 juin.