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Affaire Bétharram : la congrégation religieuse reconnaît sa «responsabilité», les victimes font part de leur «soulagement»

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Dans une interview accordée à l’AFP, le prêtre Laurent Bacho, de la congrégation religieuse des pères de Bétharram, dit ce mardi 4 mars reconnaître la «responsabilité» de l’établissement catholique au cœur d’une affaire de violences physiques et de viols.
A Bétharram, le 2 mars 2025. (Marion Vacca/Libération)
publié le 4 mars 2025 à 7h26
(mis à jour le 4 mars 2025 à 14h56)

Après un mois d’un débat médiatique animé, la congrégation religieuse prend enfin la parole. Dans une interview accordée à l’AFP, le prêtre Laurent Bacho, qui s’exprime au nom de l’institution, a reconnu ce mardi 4 mars la «responsabilité» de Notre-Dame de Bétharram et annonce des mesures, alors que de nombreux plaignants fustigeaient son «mutisme».

S’exprimant au nom de ses pairs, le prêtre Laurent Bacho a assuré se sentir «responsable» face aux «souffrances de ces enfants […] anéantis». Parallèlement, la congrégation annonce la création d’un nouveau fonds d’indemnisation pour les victimes de violences sexuelles prescrites commises par des laïcs, alors que le champ d’action de la Commission reconnaissance et réparation (CRR) mise en place par l’Eglise depuis 2021 se limite à celles commises par des religieux.

«Un soulagement»

«C’est déjà un immense soulagement parce que depuis 15 mois, on se bat contre cette congrégation pour lui expliquer que ce qui s’est passé est inqualifiable, intolérable et inacceptable», a réagi son porte-parole Alain Esquerre auprès de journalistes. «Aujourd’hui, on franchit un pas de plus dans le processus de reconnaissance des victimes de violences sexuelles parce que jusqu’à présent, la congrégation refusait de prendre en charge leurs responsabilités concernant les laïcs», a-t-il estimé. Esquerre considère toutefois que «ce n’est toujours pas suffisant parce qu’il faut aussi accompagner les victimes de violences physiques perpétrées pendant des décennies dans cet établissement». Il a ajouté regretter le positionnement «contraint» et tardif d’une «congrégation acculée», qui «aurait dû reconnaître» ses responsabilités «depuis des décennies». Mais selon lui, «Bétharram va faire jurisprudence au niveau national pour toutes les violences physiques et sexuelles commises à la fois par des prêtres et par des laïcs».

Ce lundi, Laurent Bacho annonce également le lancement d’une commission d’enquête indépendante pour identifier «les causes» des «abus massifs» commis durant des décennies dans ce collège-lycée des Pyrénées-Atlantiques sous contrat avec l’Education nationale. La future commission d’enquête, dont les membres doivent encore être définis, recueillera la parole des victimes «dans différents pays» où la congrégation a des établissements et «pourra étudier les archives», a détaillé Laurent Bacho. Elle devra mettre en place des outils pour éviter un nouvel «aveuglement».

Fonds d’indemnisation

Ce nouveau fonds d’indemnisation sera financé par «la vente des quelques biens immobiliers» appartenant à la congrégation sur la commune de Lestelle-Bétharram. Pour l’heure, l’indemnisation de 19 victimes via la CRR, à hauteur de 700 000 euros, a absorbé 60 % de ses finances. «La réparation financière est importante parce qu’elle donne du poids à nos mots», souligne Laurent Bacho.

La congrégation veut aussi agir sur le plan «mémoriel», avec l’idée d’édifier un monument ou d’installer une plaque. Elle participera à un forum sur les violences sexuelles organisé le 15 mars à Bayonne par l’Institut francophone pour la justice et la démocratie (IFJD), une ONG qui l’accompagne depuis mai dans sa démarche auprès des victimes.

D’anciens religieux et personnels laïcs de Notre-Dame-de-Bétharram sont visés par plus de 150 plaintes déposées par des anciens élèves pour violences physiques, agressions sexuelles et viols. Après un an d’enquête, le parquet de Pau a ouvert une information judiciaire il y a dix jours et un ancien surveillant né en 1965 a été mis en examen et placé en détention provisoire. La très grande majorité des faits dénoncés, qui remontent jusqu’aux années 1950 et s’étalent sur un demi-siècle, sont prescrits.

Mis à jour à 8 h 15 avec plus de contexte puis à 14 h 55 avec la réaction de l’association des victimes.