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Justice

Affaire des assistants fictifs du RN : Louis Aliot, condamné à six mois de prison et trois ans d’inéligibilité, garde son fauteuil de maire de Perpignan

Affaire des assistants: le RN en procèsdossier
L’édile de la plus grande municipalité administrée par le RN, ex-eurodéputé, est condamné par la justice à une peine d’inéligibilité de trois ans sans exécution provisoire pour l’emploi fantomatique de l’un de ses anciens collaborateurs.
Louis Aliot au tribunal judiciaire de Paris, le 14 octobre 2024. (Denis Allard/Libération)
publié le 31 mars 2025 à 13h02

Le tribunal de Paris a prononcé ce lundi 21 mars une peine de dix-huit mois de prison dont six mois ferme, directement aménagés sous bracelet électronique, et trois ans d’inéligibilité à l’encontre de Louis Aliot, maire de Perpignan et vice-président du RN.

Le tribunal n’a pas prononcé d’application immédiate de la peine d’inéligibilité contre Louis Aliot, eu égard au montant relativement faible des détournements de fonds le concernant et de la courte durée de son contrat. «Il convenait de tenir compte de la proportionnalité de l’atteinte de cette mesure, sur un mandat en cours pour un élu local», afin de «préserver la liberté des électeurs», a indiqué le tribunal.

Condamné lundi pour détournement de fonds publics à une lourde peine d’amende assortie d’une inéligibilité de trois ans mais sans exécution provisoire, il garde ainsi son mandat en cours à la mairie de Perpignan, plus grande ville administrée par le RN en France (120 000 habitants). Parmi les prévenus au procès des assistants parlementaires fictifs du RN, l’ex-député européen était, en tant que double élu local, le plus exposé à une telle sanction. Il reste aussi premier vice-président du parti d’extrême droite.

Anticipant sa condamnation, Louis Aliot s’était empressé, à l’approche du délibéré, de commander un sondage de satisfaction à un institut et d’en partager les résultats – forcément positifs – joyeusement relayés par Marine Le Pen et Jordan Bardella. Ainsi, Aliot pourra faire valoir dans la presse qu’il est «plébiscité» par ses électeurs. Imaginant que les juges auraient appliqué pour lui une condamnation moins lourde que celle requise contre lui par le parquet à l’automne, et pensant pouvoir se représenter en 2026, Aliot avait désigné il y a quelques jours la personne qui aurait pu lui succéder dans son fauteuil d’édile. L’heureuse élue se serait appellée Patricia Fourquet, l’une de ses adjointes, une totale inconnue, choisie pour son manque d’ambition.

Incapable de justifier l’emploi fantomatique de son ancien assistant

Escompter pour sa personne une modeste peine dans ce dossier des assistants fictifs était bien ambitieux : Aliot, ex-député européen, était poursuivi pour l’emploi fictif de l’un de ses anciens «collaborateurs», un certain Laurent Salles, payé des mois par Bruxelles alors qu’il officiait en fait à la direction nationale aux grandes manifestations du Front national. Jusqu’au procès, qui s’est tenu à l’automne devant la 11e chambre du tribunal correctionnel de Paris, Aliot avait toujours refusé de répondre à la justice. Se contentant du peu courageux «je refuse de répondre», pour les 80 questions que lui ont posées les juges lors de son audition en octobre 2018. De fait, les explications données par Aliot une fois à la barre en 2024, ne valaient pas non plus tripette : il a été incapable de justifier l’emploi fantomatique de son ancien assistant parlementaire, avec qui il n’a échangé qu’un seul SMS en huit mois, pas un coup de fil, sur toute la durée de son contrat. Aliot, avocat de profession, n’a rien trouvé de mieux que de soutenir qu’il n’avait donné à faire au type qu’une seule tâche : trier son courrier deux fois par jour, ce qu’il n’a de toute façon, semble-t-il, jamais fait.

Deux ans après son élection, le premier vice-président du RN n’a pas fait beaucoup mieux que ses prédécesseurs, faisant exploser la masse salariale de la ville, augmentant les salaires, notamment le sien, gonflant les dépenses en communication à des niveaux jamais atteints, recrutant quelques amis, ou amis d’amis… Sa mairie est depuis devenue un panier de crabes sans nom, avec ambiance délétère, menaces et autres amabilités. En mars, l’une de ses élues, Soraya Laugaro, adjointe à l’urbanisme, a porté plainte pour harcèlement après avoir retrouvé une inscription écrite en grosses lettres sur le mur de son bureau : «Sale arabe.»