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Libération
«Mutuelles de Bretagne»

Affaire Ferrand : l’ex-président de l’Assemblée échappe finalement aux poursuites

Cette décision permettra à Richard Ferrand d’éviter le procès. Il était soupçonné d’avoir profité de sa situation de directeur général des Mutuelles de Bretagne pour favoriser sa compagne.
Richard Ferrand à Matignon, le 29 juin dernier. (Julien de Rosa /AFP)
publié le 5 octobre 2022 à 14h55

Les poursuites à l’encontre de cet ancien pilier de la Macronie devraient prendre fin. La Cour de cassation a confirmé ce mercredi la prescription pour le délit de «prise illégale d’intérêt» visant Richard Ferrand dans l’affaire des «Mutuelles de Bretagne». «C’est une satisfaction. C’est bien la preuve que cette affaire, qui dès le départ avait été classée, n’aurait jamais dû être rouverte», affirme Emmanuel Piwnica, avocat de Richard Ferrand, qui maintient que les faits n’étaient de toute façon «pas établis». «Je considère que c’est fini aujourd’hui. L’affaire est terminée, point.»

De son côté, Jérôme Karsenti, l’avocat de l’association anti-corruption Anticor qui avait déposé plainte contre l’ex-président de l’Assemblée nationale, estime que «la Cour de cassation a fait une interprétation très stricte du droit, faisant échapper Richard Ferrand à sa responsabilité pénale». Et ajoute : «Il n’en reste pas moins que les faits sont constitués et qu’il n’échappe au procès que par un moyen procédural.»

L’ancien président de l’Assemblée nationale est soupçonné d’avoir profité de sa situation de directeur général des Mutuelles de Bretagne, de 1998 à 2012, pour favoriser sa compagne. Une situation qui aurait permis à celle-ci d’acheter en 2011 un bien immobilier sans débourser un centime. Le dossier doit formellement repasser entre les mains du juge d’instruction, qui devrait prononcer un non-lieu contre Richard Ferrand, mis en examen depuis 2019 pour «prise illégale d’intérêt».

Faits prescrits

L’affaire, révélée en 2017 par le Canard Enchaîné, avait coûté à Richard Ferrand son éphémère portefeuille de ministre de la Cohésion des territoires, un mois à peine après sa nomination. Mais elle ne l’avait pas empêché d’être élu au perchoir de l’Assemblée nationale à l’automne 2018. Richard Ferrand est aujourd’hui sans mandat, battu aux dernières élections législatives par une candidate socialiste de 38 ans dans la 6e circonscription du Finistère.

Anticor avait déposé plainte avec constitution de partie civile à Paris en 2017, après un premier classement sans suite du parquet de Brest. Une information judiciaire avait alors été ouverte. Trois juges d’instruction lillois - où le dossier a été délocalisé - avaient mis en examen Richard Ferrand en 2019 et placé sa conjointe, Sandrine Doucen, sous le statut plus favorable de témoin assisté. Les avocats de Ferrand avaient alors saisi la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Douai, considérant les faits prescrits, le délai étant de trois ans dans cette affaire.

Les juges leur avaient donné raison en mars 2021 : ils estiment les faits prescrits soit depuis 2014, soit depuis 2015, c’est-à-dire trois ans après la signature du bail ou trois ans après la démission de Richard Ferrand des Mutuelles. Dans les deux cas, avant qu’ils ne soient dénoncés à la justice. Le pourvoi en cassation d’Anticor, rejeté mercredi, visait à casser cette décision. L’association estimait que le délai de prescription avait débuté à la révélation des faits en 2017, car ils avaient auparavant été dissimulés. Cette décision tombe au moment où deux autres proches d’Emmanuel Macron, le secrétaire général de l’Elysée Alexis Kohler et le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, sont mis en cause dans des affaires d’atteinte à la probité.