Empêcher l’aide à mourir sera puni. En conclusion de la discussion du texte, les députés ont approuvé ce samedi 24 mai la création d’un délit d’entrave à l’accès à l’aide à mourir, contre le «fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher» de «pratiquer ou de s’informer» sur ce sujet, tout en renforçant la peine encourue.
Ce délit sera constitué en cas de perturbation de «l’accès» aux lieux où est pratiquée l’aide à mourir, «en exerçant des pressions morales ou psychologiques», «en formulant des menaces ou en se livrant à tout acte d’intimidation» vis-à-vis des patients ou des professionnels de santé.
Deux ans de prison et 30 000 euros d’amende
Il est similaire au délit d’entrave aux interruptions volontaires de grossesse, qui prévoyait également une pénalisation des sites colportant de fausses informations sur l’IVG. Les députés ont également alourdi la peine prévue, la portant à deux ans de prison et 30 000 euros d’amende, pour la calquer sur celle concernant l’IVG.
Interview
L’article, adopté par 84 contre 49, a provoqué de vifs débats. «Jusqu’où ira ce délit d’entrave dans l’interprétation ?», s’est inquiété le député Thibault Bazin (LR). «Comment comprendre à l’avenir la prévention du suicide, voire même la non-assistance à personne en danger ?»
D’autres parlementaires ont évoqué le cas de proches qui tenteraient de dissuader un parent. «Ce délit d’entrave, tel qu’il est rédigé, peut créer de l’arbitraire», a abondé Patrick Hetzel (LR).
De son côté, la ministre de la Santé, Catherine Vautrin, s’est attachée à rassurer les députés. «Ce que l’on est conduit à dire […] dans un cercle amical, familial, est évidemment une approche personnelle qui n’est pas constitutive d’un délit d’entrave», a-t-elle martelé, invoquant à plusieurs reprises une décision du Conseil constitutionnel.
«Le fait de proposer des soins palliatifs, des alternatives ou d’autres perspectives, de faire part d’un doute, d’ouvrir un dialogue ou même de retarder une décision jugée prématurée […] ne peut pas être regardé comme une pression», a-t-elle ajouté.
«On ne peut créer un délit d’incitation à un droit, ce n’est pas possible»
En vain, certains députés ont tenté d’introduire un «délit d’incitation» à l’aide à mourir, pour selon eux «rééquilibrer» le texte.
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«Je pense qu’il ne faut ni empêcher, ni inciter», a jugé Cyrille Isaac-Sibille (MoDem). «On ne peut créer un délit d’incitation à un droit, ce n’est pas possible», a répondu Elise Leboucher (LFI), rapporteure de cette partie du texte. «L’arsenal répressif permet déjà de couvrir totalement le risque de pressions et de manœuvre», a ajouté la ministre Vautrin, citant notamment l’abus de faiblesse.
Les députés ont achevé ce samedi l’examen en première lecture de la proposition de loi. Ils voteront solennellement mardi, après avoir voté sur un texte consacré aux soins palliatifs. L’Assemblée nationale avait entamé le 12 mai l’examen de ces deux propositions de loi.
Les députés ont approuvé au cours de débats globalement sereins la création d’un «droit à l’aide à mourir» qui sera ouvert aux personnes atteintes «d’une affection grave et incurable» qui «engage le pronostic vital, en phase avancée» ou «terminale», et présentant «une souffrance physique ou psychologique constante».