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Libération
L'édito d'Hamdam Mostafavi

Après la condamnation de Marine Le Pen, le danger du poison anti-juges

Affaire des assistants: le RN en procèsdossier
Politiques à l’Assemblée ou anonymes sur les réseaux sociaux, ceux qui remettent en cause le travail de la justice et dénoncent un prétendu «système» entretiennent un climat délétère pour la démocratie.
Marine Le Pen, au tribunal de Paris, lundi 31 mars 2025. (Denis Allard/Libération)
publié le 1er avril 2025 à 20h51

La folle machine médiatique est lancée à plein régime, la logorrhée se répand, envahit les ondes, squatte les écrans, diffuse un discours nauséabond néo-trumpien à la sauce Rassemblement national. Un tourbillon de paroles sans queue ni tête, dont le seul but consiste à noyer la vérité des faits dans un océan de déclarations douteuses. Au RN, tout a semblé vaciller pendant un instant face au choc de la décision, tant la leader d’extrême droite s’était refusée à préparer les troupes au pire.

Après ce moment d’errement, très vite, la riposte s’est organisée et les éléments de langage se sont coordonnés. Par Marine Le Pen elle-même qui, sur TF1, plaidait «le désaccord administratif avec le Parlement européen» au mépris du délibéré – coupable, faut-il le rappeler. Par ses envoyés dans l’hémicycle, mardi 1er avril, lors des questions au gouvernement, qui n’ont eu de cesse de minimiser, distordre, remettre en cause le travail de la justice, dénoncer un prétendu «système». Par ses émissaires sur les plateaux de la sphère Bolloré qui agitent sans vergogne les concepts complotistes d’Etat profond, criant à la mort de la démocratie. Par tous les anonymes qui, sur les réseaux sociaux, menacent les trois juges du dossier, placés sous protection policière. Par tous ceux qui agitent l’idée d’un pseudo «gouvernement des juges».

Face à ses attaques, le Premier ministre, François Bayrou, et le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, ont affirmé dans l’hémicycle leur soutien inconditionnel aux juges. Mais le mal est déjà fait lorsque Bayrou évoque des «interrogations» sur la question de l’exécution provisoire, ou exprime son «trouble», prenant le risque d’alimenter le doute. Il n’y a pas de «trouble», il y a des preuves accumulées, des peines prononcées, des coupables désignés. Marine Le Pen, comme tout citoyen, a pu s’en remettre à la cour d’appel qui a annoncé mardi pouvoir «rendre une décision à l’été 2026». D’ici là, les politiques n’ont rien à gagner, quel que soit leur bord, à entretenir l’ambiguïté sur l’indépendance de la justice.