A quelques mois des municipales, c’est une campagne en dehors de France qui intéresse le mouvement de Jean-Luc Mélenchon, La France insoumise (LFI). Celle pour la mairie de New York, où les insoumis se sont pris de passion pour la nouvelle figure de la gauche américaine Zohran Mamdani, dans laquelle ils veulent se reconnaître.
Favori dans les sondages, l’homme politique de 34 ans, musulman, qualifié de «communiste» par Donald Trump, a émergé notamment grâce à un programme radical, à destination des classes populaires et des jeunes, et un discours résolument pro-palestinien. A la surprise générale, il a gagné la primaire démocrate en juin et s’est confortablement installé en tête des sondages pour cette élection dont le vainqueur sera connu mardi soir.
«Le fond de sa campagne est extrêmement radical pour les Etats-Unis puisqu’il porte des sujets de justice fiscale et le gel des loyers. Son programme a été moqué par l’establishment du parti démocrate mais c’est grâce à ça qu’il est monté dans les sondages», observe auprès de l’AFP la députée insoumise Clémence Guetté, responsable du programme de la formation de Jean-Luc Mélenchon.
«On reste sur un schéma extrêmement similaire aux nôtres, avec des propositions radicalement concrètes», appuie l’eurodéputée LFI Manon Aubry, qui a participé la semaine dernière à un évènement de campagne de Zohran Mamdani à New York, en faisant du porte-à-porte pour le candidat.
«Nos homologues américains»
C’est le côté «outsider» de cet Ougandais de naissance, naturalisé américain en 2018, qui plaît à LFI. S’il a eu l’investiture du parti démocrate, c’est son adversaire à la primaire Andrew Cuomo qui sera son principal rival, désormais candidat indépendant face à lui. Et beaucoup de figures de la frange modérée du parti n’ont pas appelé à voter pour Zohran Mamdani.
De quoi conforter les insoumis dans les parallèles qu’ils dressent avec le candidat new-yorkais, eux qui reprochent encore au reste de la gauche de ne pas avoir soutenu Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle de 2022. Et de quoi renforcer également leur volonté de ne pas participer à une primaire en 2027. «C’est la preuve qu’une élection primaire entre des candidats qui ne sont pas d’accord entre eux est vouée à l’échec», assure Manon Aubry.
Interview
Dans la grille de lecture des insoumis, le Parti socialiste français, à qui ils reprochent une orientation trop modérée, pourrait s’apparenter au parti démocrate américain. Et ils se réjouissent que Mamdani appartienne à la petite organisation des Socialistes démocrates d’Amérique (Democratic socialists of America, DSA), dans un pays où le terme «socialiste» a une connotation très radicale. «Les DSA sont nos homologues américains, on a des liens avec eux», estime Clémence Guetté. Autre point commun que voit la députée insoumise : «les campagnes de diffamation qu’il a subies».
«L’électorat national n’est pas prêt»
Les prises de position de Zohran Mamdani sur Israël (qualifié de «régime d’apartheid») et la guerre à Gaza (un «génocide»), lui valent l’hostilité d’une partie de la communauté juive. La France insoumise est souvent accusée d’ambiguïté sur la question de l’antisémitisme et dénonce en retour des attaques politiques et médiatiques visant, selon ses membres, à discréditer la défense de la cause palestinienne. La manière dont le candidat a fait campagne, avec un usage soutenu des réseaux sociaux et une forte mobilisation militante, ressemble également au modus operandi des troupes LFI.
Zohran Mamdani a «compris que la question de l’accessibilité financière est essentielle», avance Daniel Schlozman, professeur de sciences politiques à l’université Johns Hopkins, «mais selon toute vraisemblance, l’électorat national n’est pas prêt pour (sa) politique», poursuit-il.
Un parallèle peut aussi être établi avec la situation des Insoumis, forts dans les grandes villes et les banlieues populaires, mais dont le message porte beaucoup moins bien dans les zones rurales ou périurbaines. «A la base, Mamdani n’était fort nulle part. On ne peut pas être défaitiste et se dire que ce discours ne touchera jamais le reste des Etats-Unis», veut croire Manon Aubry.