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Libération
En attendant le vote

Budget 2025 : l’Assemblée vient à bout du volet recettes

Gouvernement Bayroudossier
Les députés ont achevé dans la nuit de vendredi à samedi l’examen du texte budgétaire, détricotant amplement le projet initial du gouvernement, avant un vote final incertain mardi 12 novembre.
Un membre d'une Assemblée désertée, lors du débat sur le budget, le 22 octobre. (Stephanie Lecocq/Reuters)
publié le 9 novembre 2024 à 9h32

Trois heures du matin et un premier volet enfin mis en boîte. Après trois semaines de discussion, les députés ont terminé, dans la nuit de vendredi 8 novembre à samedi 9 novembre, l’examen des plus de 3 000 amendements dédiés à la partie recettes du budget 2025.

Le principal changement visible sur ce texte très largement remanié par les élus porte sur la prévision de déficit, ramenée de 142 à 85 milliards d’euros, notamment du fait d’une «hausse d’impôts de 35 milliards» et de la suppression de l’enveloppe de 23 milliards destinée à l’Union européenne. De quoi amener le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, à juger cette résorption «largement artificielle», cette enveloppe étant amenée à être réintroduite dans la suite de la navette parlementaire, tandis que le député centriste et rapporteur général du budget Charles de Courson calculait une hausse des recettes limitées à «12 milliards en comptant large», le reste étant «probablement euro-incompatible, ou inconstitutionnel».

Un chiffrage contesté par le président de la commission des finances, l’insoumis Eric Coquerel, qui a retenu la «satisfaction» d’avoir «trouvé des dizaines de milliards de recettes nouvelles» et ainsi «baissé le déficit à moins de 3 %» du PIB. De fait, la gauche a déroulé une bonne partie de son programme des dernières législatives. Les nouvelles taxes ont fleuri, que ce soit sur les «superprofits», les «super dividendes», les rachats d’actions, les «grandes sociétés du numérique», les multinationales ou encore le patrimoine de milliardaires.

Un bloc central aux abonnés absents

Le gouvernement n’a pu que constater les dégâts : des 41 articles de son texte initial, une douzaine ont été purement et simplement supprimés par l’Assemblée. Et non des moindres : exit ainsi la hausse de la taxe sur l’électricité, l’alourdissement du malus automobile et la surtaxe sur les grandes entreprises, à chaque fois avec les voix de la droite et du centre, pourtant censés soutenir l’exécutif.

Hormis ces actes de rébellion, le «socle commun» a surtout brillé par son absence tout au long des débats, incapable de se mobiliser même lors du vote symbolique sur la contribution européenne.

Le bloc central est même apparu divisé sur son traditionnel tabou fiscal. Ainsi, le Modem, plutôt ouvert sur le sujet, a voté pour rendre pérenne la surtaxe sur les hauts revenus, que le gouvernement voulait seulement limiter aux deux prochaines années. De même, le groupe Horizons est à l’initiative d’un coup de rabot sur le crédit impôt recherche, autre totem macroniste.

Souvent en position d’arbitre, le Rassemblement national a parfois fait pencher la balance à gauche. Comme vendredi pour faire adopter une taxe sur l’importation de viande bovine, afin de marquer un refus partagé de l’accord de libre-échange européen avec le Mercosur sud-américain.

Au terme de l’exercice, rares sont les motifs de satisfaction pour l’exécutif, qui a réussi à maintenir la hausse de TVA sur les chaudières à gaz et à introduire par amendement une hausse de la taxe sur les billets d’avion, au prix toutefois de plusieurs concessions.

Quelles positions pour le vote solennel de mardi ?

Reste à savoir si tout cela aura servi à quelque chose. L’ensemble de la partie «recettes» doit en effet faire l’objet d’un vote solennel dans l’hémicycle mardi après-midi. En l’état, ce «barbouillis fiscal» n’est «pas votable en l’état», a affirmé le macroniste David Amiel. «Sentiment de gâchis» également pour le chef du groupe Modem, Marc Fesneau, qui a estimé que le rejet de l’article sur l’UE suffisait «à invalider ce budget».

A l’inverse, la gauche «va évidemment le voter», a prédit Eric Coquerel, s’interrogeant sur «ce que fera le RN» après avoir adopté ou s’être abstenu sur de nombreuses mesures. Plusieurs cadres du groupe d’extrême droite ont cependant fait savoir hors micros que leur groupe s’orientait vers un vote contre, au vu notamment du montant total des hausses d’impôts.

En revanche, si les députés approuvent cette première partie, ils passeront dans la foulée à la discussion des crédits alloués aux différentes missions de l’Etat, avec l’obligation d’aboutir avant la date butoir du 21 novembre.