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Hémicycle

Budget : les débats s’embourbent à l’Assemblée nationale, l’examen de la taxe Zucman décalé

Plusieurs mesures ont été votées samedi 25 octobre par des alliances inattendues, faisant diminuer les prévisions de recettes pour l’Etat de plusieurs milliards d’euros. Mais les discussions se sont tendues avant leur clôture dans la nuit. Elles reprendront lundi.

Le Premier ministre Sébastien Lecornu, la Ministre chargée des Comptes publics Amélie de Montchalin et le ministre des Finances Roland Lescure, dans l'Assemblée nationale le 24 octobre 2025. (Alain Jocard/AFP)
Publié le 26/10/2025 à 8h33

Pour le deuxième jour d’examen du budget à l’Assemblée samedi 25 octobre, les débats se sont éternisés et se sont terminés sans que les mesures sur la taxation du patrimoine n’aient commencé à être débattues, après que le gouvernement a essuyé ses premiers revers.

Peu avant minuit, la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin a annoncé qu’à la reprise des débats lundi, certains articles seraient examinés en priorité, repoussant de facto l’examen de la taxe Zucman, défendue par la gauche, à plus tard dans la semaine. Possiblement mardi ou mercredi. Et avec lui, l’ultimatum lancé au Premier ministre Sébastien Lecornu par les socialistes, qui avaient exigé des mesures fortes en faveur de la justice fiscale d’ici lundi, en brandissant la menace de la censure.

Amélie de Montchalin a précisé que ce changement avait été acté pour «permettre la présence au banc» dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale lundi du ministre de l’Economie Roland Lescure, dont des obligations le reste de la semaine le retiendront «loin de Paris».

Manuel Bompard, le coordinateur de LFI, a accusé le gouvernement d’avoir changé l’ordre de priorité des articles examinés à partir de lundi pour laisser du temps à leurs négociations «lors de réunions secrètes» avec les socialistes.

Baisse des recettes

La journée de samedi avait pourtant démarré sur un bon rythme, marquée par deux victoires pour la droite. Les députés ont approuvé dans la matinée la défiscalisation de l’intégralité des heures supplémentaires, un «signal» envoyé à «la France qui travaille», s’est réjoui le patron du groupe LR Laurent Wauquiez, à l’origine de la mesure votée. Elle coûtera un milliard d’euros, Amélie de Montchalin, qui invitait de son côté à «cibler» davantage le dispositif qui profite, selon elle, principalement aux cadres. Cela n’a pas empêché une majorité des députés macronistes de voter l’amendement, à l’unisson de LR et du RN.

Puis, en début d’après-midi, les députés ont adopté un deuxième amendement de Laurent Wauquiez proposant d’indexer le barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation. Le gel du barème proposé par le gouvernement aurait eu pour effet de rendre éligibles à l’impôt sur le revenu 200 000 foyers supplémentaires, et d’augmenter la contribution de milliers d’autres. L’amendement du chef des députés de droite, qui prive le budget de l’Etat de 2 milliards d’euros, a reçu l’approbation d’une large coalition réunissant extrême droite, droite, une partie des macronistes et Insoumis.

Cette multiplication des dépenses inquiète Amélie de Montchalin : si elles continuent, «nous aurons beaucoup de mal à tenir nos objectifs de réduction du déficit», a-t-elle averti.

Les débats se sont enlisés en fin d’après-midi lorsque la gauche a tenté de raboter le crédit d’impôt pour les services à la personne, l’un des plus coûteux, passé en quelques années de 4 à plus de 7 milliards d’euros, et qui profiterait surtout, selon eux, aux classes les plus aisées. La droite et l’extrême droite ont défendu le dispositif mordicus, estimant qu’il permettait de créer des emplois et de lutter contre le travail au noir.

Les échanges se sont alors envenimés. Le RN Jean-Philippe Tanguy a accusé le gouvernement «d’acheter les voix des socialistes». «Les Français veulent que nous leur donnions un budget avant la fin de l’année. Cela passe par des compromis», lui a répondu Amélie de Montchalin.

Le député socialiste Philippe Brun a ensuite pris la parole pour interroger quel «deal» LFI avait passé avec «les LR» pour exempter d’effort les plus aisés avec leur vote sur l’amendement de Laurent Wauquiez.

Puis, la cheffe des députés écologistes Cyrielle Chatelain a accusé le RN de faire traîner les débats pour éviter un vote sur la taxe Zucman, que Marine Le Pen a de nouveau rejetée samedi lors d’un déplacement dans les Vosges, précisant que le RN ne voterait que leur impôt sur la fortune financière, qui exempte la résidence principale.

Le vote prévu mardi

Un compromis reste-t-il possible ? Sur la taxation sur le patrimoine, «on essaie de trouver un terrain d’atterrissage» avec les socialistes, explique à l’AFP un cadre du camp gouvernemental, précisant que les échanges se poursuivent.

Les débats sur la partie recettes du budget n’en sont qu’à leurs débuts, avec un vote solennel sur cette partie prévue mardi 4 novembre.

Autre condition posée à la non-censure par les socialistes : la suspension de la réforme des retraites, qui a été ajoutée dans le projet de budget de la Sécuruité sociale (PLFSS), dont l’examen démarre lundi en commission de l’Assemblée nationale. Mais si les députés venaient à voter la suspension, le président du Sénat Gérard Larcher a déjà prévenu samedi soir que la réforme des retraites serait «rétablie» lors du passage du texte à la chambre haute.