Les esprits se sont échauffés ce mercredi 6 mars après-midi à l’Assemblée nationale, au moment de l’examen d’un texte contre les infractions à caractère raciste ou antisémite. La séance a vite tourné au règlement de comptes politique entre la majorité présidentielle et La France insoumise, mais aussi entre ces deux camps et le RN. Après un début d’examen en pente douce, le ton est monté, entre mises en cause personnelles et anathèmes, lors des débats autour d’un texte Renaissance visant notamment à renforcer les peines pour «provocations, diffamations et injures non publiques à caractère discriminatoire», en en faisant des délits.
Ainsi le député RN, Julien Odoul, a parlé de «dérive antisémite» des «partisans de Jean-Luc Mélenchon», accusant notamment des responsables LFI de complaisance avec le Hamas après le 7 octobre. L’élu d’extrême droite a également fustigé une «duplicité» des macronistes contre l’antisémitisme, annonçant qu’il voterait «contre» le texte. S’exprimant après lui à la tribune, la députée LFI Nadège Abomangoli a ironisé sur «l’honneur» de «passer après un raciste et négationniste antisémite».
«Faites le ménage chez vous», tonne Dupond-Moretti
Aux bancs des ministres, le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, a fait feu de tout bois, en évoquant des «extrêmes qui se rejoignent». Il a d’abord accusé les insoumis de vouloir «complaire à [un] électorat islamiste», reprochant au leader du parti, Jean-Luc Mélenchon, d’avoir dit sur X (anciennement Twitter) que la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, était allée «camper à Tel-Aviv pour encourager le massacre» à Gaza.
Le député LFI, Antoine Léaument, a répliqué en accusant le ministre de se comporter en «commissaire politique du Rassemblement national». Puis, se tournant vers les bancs du RN, le ministre de la Justice s’est lancé dans une longue charge contre des propos tenus par des responsables du parti d’extrême droite, reprochant à son président, Jordan Bardella, d’être «incapable de dire si Jean-Marie Le Pen est antisémite». «Vous oubliez de rappeler que l’antisémitisme, il vient aussi de votre parti fondé par un Waffen-SS». «Faites le ménage chez vous», a encore grondé le ministre.
"C'est vous qui l'avez inventée": Éric Dupond-Moretti répond au député RN Julien Odoul, qui l'accuse d'avoir fait une quenelle à l'Assemblée pic.twitter.com/iV4F5d4JXD
— BFMTV (@BFMTV) March 6, 2024
La tension a culminé lorsque Julien Odoul a accusé le garde des Sceaux d’avoir fait une «quenelle antisémite» dans l’hémicycle, exigeant des excuses. Ladite «quenelle» (bras tendu vers le bas et main opposée posée sur l’épaule) a été popularisée par le polémiste Dieudonné, condamné à plusieurs reprises pour des déclarations antisémites, geste qu’il qualifiait d’«antisystème». «C’est vous qui l’avez inventée, la quenelle», a rétorqué le ministre, en reproduisant le geste et en fustigeant l’essayiste d’extrême droite Alain Soral, condamné pour «injure publique» après la diffusion en 2019 sur Internet d’un cliché le montrant en train d’effectuer une «quenelle».