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Réactions

Conseil national de la refondation de Macron: le Cese en rare volontaire, la CGT et l’opposition fustigent «une provocation»

Macron réélu pour un second mandatdossier
Avec la création d’une instance pour parler «des chantiers du quinquennat», l’opposition dénonce des prérogatives similaires à celle du Parlement, tandis que le Conseil économique, social et environnemental salue ce qu’il appelait «de ses vœux depuis longtemps».
Emmanuel Macron, vendredi à l'Elysée. (Julien de Rosa/AFP)
publié le 4 juin 2022 à 16h00

Après le Grand Débat ou encore la convention citoyenne, Emmanuel Macron a donc fait une proposition fracassante vendredi soir : créer un «Conseil national de la refondation» (CNR). Une instance qui réunira «les forces politiques, économiques, sociales, associatives, des élus des territoires et de citoyens tirés au sort pour travailler sur les chantiers prioritaires du quinquennat» et inspirée, à ses yeux, du Conseil national de la résistance – «Nous vivons un temps comparable.» Et comme pour rappeler, sans le dire, que le Président réinvente ce qui existe déjà, Thierry Beaudet, le président du Conseil économique, social et environnemental (Cese), s’est porté volontaire quelques heures plus tard.

«Ces derniers mois, dans un contexte de fatigue démocratique inédit et de malaise social grandissant, le Cese a à plusieurs reprises alerté sur la nécessité d’une pratique démocratique renouvelée pour associer les citoyens aux sujets qui les concernent, a rappelé Thierry Beaudet. Parce qu’il regroupe 175 femmes et hommes de terrain, désignés par plus de 80 organisations, parce qu’il est l’institution qui arrime la participation citoyenne à la République, le Cese, chambre de la société agissante, est le lieu adéquat pour faire vivre cette nouvelle pratique.» Avant d’ajouter, si jamais le message n’était pas suffisamment clair : «Le Cese est prêt à prendre toute sa part dans une refondation qu’il appelle de ses vœux depuis longtemps.»

Thierry Beaudet et le Cese semblent être parmi les rares à être intéressés par ce CNR. «Emmanuel Macron veut décider tout seul et va créer une nouvelle usine à gaz avec ce Conseil national de la refondation», a par exemple réagi dans la foulée vendredi, Catherine Perret, secrétaire confédérale de la CGT chargée des retraites et de la protection sociale. Pour elle, les annonces ne sont pas des «réponses à la hauteur de la situation que vit le pays» mais plutôt une «provocation». Elle y voit une «référence par un acronyme au Conseil national de la Résistance» et un président qui «se prend pour Ambroise Croizat». Le CNR «a créé des droits, des améliorations qui sont toujours en vigueur», ajoute Catherine Perret : «La CGT compte bien défendre ce système de la retraite et le retour de la retraite à 60 ans au mépris de ce que veut le président de la République.»

«Bidule» et «artifice»

Côté politique aussi, la proposition n’a pas convaincu. «C’est un Conseil national de la manipulation, c’est ridicule, a assené Alexis Corbière, député LFI de Seine-Saint-Denis. Il a mis en place une Convention citoyenne sur le climat qu’il n’a même pas respectée. Monsieur Macron sent le danger. Nous sommes en tête dans les sondages. Il fait une longue interview extrêmement bavarde où il ne dit pas grand-chose et il fait croire qu’il va mettre en place un bidule dans lequel le Macron numéro 1, autoritaire, qui n’a pas écouté les Français, va cette fois les écouter. Cela ne marche pas comme ça.»

Même son de cloche côté LR. Le CNR «n’est qu’un gadget de plus», tacle François-Xavier Bellamy, député européen Les Républicains. «Le deuxième mandat d’Emmanuel Macron est à peine entamé qu’on n’en peut déjà plus de ce nouvel artifice de communication, ajoute-t-il. [Le Président] nous dit : “Je vais arrêter de tout décider tout seul, maintenant on va rentrer dans un grand débat permanent.” Mais Emmanuel Macron est à deux doigts d’inventer l’Assemblée nationale !»

Même sentiment chez le sénateur socialiste Jean-Pierre Sueur : «“CNR” : à quoi va servir l’Assemblée nationale ? Alors que les législatives n’ont pas eu lieu, Emmanuel Macron annonce la création d’une instance ad hoc (Conseil National de la Refondation), dont les prérogatives sont celles… du Parlement ! Peut-on ainsi jouer avec les institutions ?» On est loin du consensus national qui avait émergé du Conseil national de la résistance.