Réparer au plus vite. Le projet de loi pour la reconstruction accélérée de Mayotte est présenté ce mercredi 8 janvier en Conseil des ministres. Selon l’exposé des motifs de ce texte d’urgence pour le département d’outre-mer, dévasté le 14 décembre par le cyclone Chido, l’objectif est de permettre aux acteurs publics de «rétablir les conditions de vie des habitants» tout «en préparant la reconstruction» du petit archipel français de l’océan Indien. Alors que le Premier ministre, François Bayrou, souhaite que l’île soit reconstruite en deux ans, cette loi vise à contourner plusieurs règles d’urbanisme et de fiscalité pour accélérer les travaux. Elle avait été annoncée par Emmanuel Macron le 19 décembre, lors de sa visite de Mayotte, comme ce qui avait pu être mis en place pour la reconstruction de Notre-Dame ou l’organisation des Jeux olympiques.
Reconstruire les écoles
La loi prévoit ainsi que «les constructions à usage d’hébergement d’urgence édifiées à Mayotte […] postérieurement au 14 décembre 2024 et jusqu’à l’expiration d’un délai de deux ans suivant la publication de la présente loi […] [soient] dispensées de toute formalité au titre du code de l’urbanisme». Concernant les écoles, durement touchées alors que Mayotte est le département le plus jeune de France avec un habitant sur deux mineurs, le projet prévoit que «l’Etat ou un de ses établissements publics» puisse assurer leur construction, reconstruction ou rénovation en lieu et place des collectivités locales jusqu’au 31 décembre 2027.
Reportage
Pour mener à bien cette mission, le texte souhaite élargir les missions de l’Etablissement public foncier et d’aménagement de Mayotte (Epfam) pour lui confier «la mission de coordonner les travaux de reconstruction de Mayotte». Une personnalité doit être nommée à sa tête, selon Matignon.
Expropriations
Sur le foncier, alors qu’il est souvent difficile d’identifier formellement les propriétaires des terrains à Mayotte, ce projet de loi d’urgence a pour ambition de déroger aux règles habituelles et de pouvoir exproprier avant qu’un propriétaire n’ait été identifié, quitte à l’indemniser a posteriori. Le texte contiendra aussi plusieurs mesures économiques qui resteront en vigueur «jusqu’au 31 mars 2025», comme la suspension du recouvrement des cotisations sociales des travailleurs indépendants, la prolongation des droits des assurés sociaux et des chômeurs ou l’augmentation de la prise en charge au titre du chômage partiel.
Rien en revanche sur l’habitat précaire, alors que François Bayrou avait promis lors de son déplacement fin décembre «d’empêcher la reconstruction» des bidonvilles à Mayotte. Sauf que trois semaines après le cyclone Chido, qui avait ravagé les baraques de tôles, les habitants ont vite construit de nouveaux abris de fortune. «Le texte est inacceptable parce qu’il n’apporte aucune réponse aux vraies urgences de Mayotte», estime l’ancien député et vice-président de LR en charge des outre-mer Mansour Kamardine, réclamant «une mesure qui inscrit l’interdiction des bidonvilles» dans l’archipel. De son côté, la députée Liot de Mayotte, Estelle Youssouffa, sans commenter le projet de loi d’urgence, a réclamé que «les entrepreneurs de Mayotte soient prioritaires sur les contrats» de reconstruction de l’archipel.
Interview
Selon des sources parlementaires, le texte passera en commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale dès le lundi 13 janvier, jour de la reprise de l’activité à l’Assemblée nationale. Son examen en commission pourrait se prolonger le mardi suivant, avant un examen du texte en séance le 20 janvier.
Les questions d’immigration remises à plus tard
Pour les mesures de plus long terme, notamment autour des questions d’immigration, de sécurité et de développement économique, le gouvernement prévoit un autre projet de «loi-programme», qui sera élaboré dans les trois mois, indique Matignon. En parallèle de ce projet, le nouveau ministre des Outre-Mer, Manuel Valls, a annoncé mardi 7 janvier qu’un recensement de la population serait lancé «avec l’Insee et les maires» dans le 101e département français, estimant que l’archipel français comptait «sans doute» 500 000 habitants, au lieu des 320 000 officiels, en raison de l’immigration irrégulière.
Le cyclone Chido, le plus dévastateur à Mayotte depuis quatre-vingt-dix ans, a causé la mort d’au moins 39 personnes et fait plus de 5 600 blessés, selon le dernier bilan publié par les autorités.