Passage de relais à la tête de Régions de France. L’association, qui regroupe et défend les plus grosses collectivités françaises, a porté à sa tête vendredi la socialiste Carole Delga, présidente d’Occitanie. Cette dernière représentera donc ses homologues auprès de l’exécutif dans une période capitale, marquée par un rebond épidémique, ses possibles conséquences économiques, et par la perspective de l’élection présidentielle de 2022. C’est la première fois depuis 2016 que l’association sera dirigée par une personnalité de gauche, et la première fois par une femme.
Nouveau montage
L’élection de Carole Delga, 49 ans, n’était pas acquise. Le président centriste de Normandie Hervé Morin et le président LR de Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier, qui s’étaient succédé à la tête de l’association au cours du dernier mandat, envisageaient pour le prochain un partage similaire. Mais Carole Delga a bousculé ce duo masculin, forte de deux arguments : sa réélection avec près de 58 % des voix, qui en fait la mieux réélue des présidents de région en métropole et le nouvel équilibre politique provoqué par la bascule à gauche de la Réunion. Droite et gauche contrôlent désormais huit régions chacune, la Corse (Femu a Corsica, autonomiste) et la Guadeloupe (LREM) jouant les arbitres.
Adopté à l’unanimité, le nouveau montage fait finalement de Renaud Muselier le numéro 2 de Carole Delga. Celle-ci passera la main dans trois ans à Hervé Morin, dont elle deviendra à son tour la présidente déléguée. C’est le résultat de longues négociations, achevées très peu de temps avant son son annonce officielle. «C’est plus bankable d’être président pendant la grosse phase électorale qui arrive, c’est une manière de peser», commente une source régionale. Mais la discussion est restée apaisée, selon un témoin de ces échanges : «Ils sont tous dans l’optique de ne pas s’affronter», dans une association relativement dépolitisée et privilégiant le consensus. Le clivage, chez Régions de France, passe moins entre les élus, qu’entre l’Etat central et les élus, comme l’ont rappelé bien des épisodes du quinquennat Macron. Auprès de Libération, le LR Renaud Muselier qualifiait Carole Delga, durant la campagne des régionales, de «présidente exceptionnelle» et de «fille fantastique».
Mise à l’épreuve
La présidence de l’association «est un gros boulot de lobbying, de contacts avec les parlementaires, de négociation avec les ministères, de suivi des dossiers, explique-t-on dans l’équipe dirigeante d’une autre région. C’est à la fois vraiment utile et très techno, on s’ennuie vite dans les réunions. Dans l’ensemble l’ambiance est neutre, mais un peu écrasée par la présence de figures nationales comme Valérie Pécresse ou Xavier Bertrand».
La nouvelle présidente de Régions de France est familière du Premier ministre de Jean Castex, ancien maire de Prades, dans sa région. Elle a déclaré vouloir entretenir avec lui une «relation de qualité». Plusieurs dossiers la mettront à l’épreuve. A commencer par la relance économique, avec la perspective de l’arrêt progressif des aides d’Etat, et ses possibles conséquences sociales ; la loi de décentralisation dite 3DS, dont le Sénat vient de commencer l’examen et que les collectivités jugent trop peu ambitieuse ; et la présidentielle, où plusieurs membres de l’association pourraient jouer les premiers rôles.
A lire aussi