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Investigations

Des perquisitions menées chez le député insoumis de Marseille Sébastien Delogu pour vol de documents

Le domicile et la permanence du parlementaire ont été perquisitionnés ce jeudi 15 mai, à cause d’une dénonciation d’abus de biens sociaux qu’il aurait faite à l’encontre d’une entreprise de propreté.
Sébastien Delogu à Marseille, le 15 mai. (Patrick Gherdoussi/Libération)
par Stéphanie Harounyan, correspondante à Marseille, Lucie Alexandre, AFP et LIBERATION
publié le 15 mai 2025 à 17h30
(mis à jour le 15 mai 2025 à 22h08)

Sébastien Delogu s’excuse. «C’est la première fois que vous allez me voir sans costume, souffle le député insoumis du nord de Marseille, imper beige sur le dos. Chacun sait pourquoi c’est le cas…» Le matin même, ce jeudi 15 mai vers 6 heures, les policiers ont sonné à son domicile, lui laissant à peine le temps de s’habiller, explique-t-il. Les policiers de la brigade financière sont venus perquisitionner le domicile de l’élu, puis sa permanence parlementaire, «dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte en octobre 2024 pour vol, recel de vol, mise en danger par révélation d’information relative à la vie privée par communication publique en ligne et atteinte au secret des correspondances», a précisé le parquet par la suite.

Ces perquisitions seraient liées à l’activation de l’article 40 du code de procédure pénale, selon lequel les autorités publiques ou les fonctionnaires doivent signaler au procureur un délit lorsqu’ils en ont connaissance. Le député de la 7e circonscription des Bouches-du-Rhône l’avait effectué en septembre auprès de la justice car il suspectait des abus de biens sociaux au sein de l’entreprise Laser Propreté, qui a été au centre d’un conflit social touchant le nettoyage du métro et de la gare Saint-Charles de Marseille. L’élu avait également publié sur X plusieurs tweets sur le sujet.

Selon l’entourage du député, une des personnes visées par ce signalement a ensuite déposé plainte pour recel de vol de documents et c’est dans ce cadre que les perquisitions ont été menées, les policiers cherchant à récupérer ces documents. De son côté, le parquet de Marseille a précisé à l’AFP qu’une plainte est à l’origine de l’enquête, sans aucun détail supplémentaire et sans faire aucun lien avec le signalement effectué par le député.

Laser Propreté en liquidation judiciaire

La SNCF avait finalement résilié en septembre son contrat avec Laser Propreté pour le nettoyage de la gare Saint-Charles après des pratiques frauduleuses qui consistaient à affecter les mêmes personnels sur deux marchés différents. Une autre société avait ensuite été réquisitionnée par les autorités pour nettoyer la gare, qui a un temps croulé sous les déchets. Laser Propreté est désormais en liquidation judiciaire. En parallèle, Sébastien Delogu et Manuel Bompard avaient annoncé saisir la justice au sujet de la «gestion chaotique et illégale» de l’entreprise menaçant l’emploi de ses salariés qui avaient été «les premiers lanceurs d’alerte».

Hasard du calendrier, le député avait invité la presse ce jeudi soir à l’Estaque, dans sa circonscription, pour présenter la synthèse d’une «enquête parlementaire populaire» baptisée «Marseille en vrai», passant au crible le bilan du plan «Marseille en grand» quatre ans après son lancement par le Président Emmanuel Macron. Sur la visite matinale, le député, qui ne cache pas ses ambitions pour les municipales à venir, préfère ne pas s’étaler. «Je n’ai pas de réaction, si ce n’est que je m’étonne de voir mon domicile perquisitionné et pas l’inverse, relève-t-il. Quand on donne à un député des documents susceptibles de prouver qu’il y a eu un délit, c’est de sa responsabilité de déposer un article 40.»

«Je n’ai fait que mon devoir»

Depuis l’envoi de son signalement il y a huit mois, le député marseillais assure qu’il n’avait pas eu de nouvelles de la police. «Il n’y avait pas d’autre moyen qu’une perquisition à 6 heures du matin  pointe dans son sillage Manuel Bompard, autre député LFI de Marseille et coordonnateur national du parti, qui lui aussi indique avoir signalé les mêmes faits au parquet. «J’espère que l’on va avoir des explications : pourquoi une seule perquisition ? Qui l’a décidée ? Pourquoi ce timing ? Il est difficile d’y voir autre chose qu’une intimidation, mais ce n’est pas ça qui va nous faire baisser les yeux.» Un peu plus tôt dans la journée, Jean-Luc Mélenchon s’était lui aussi indigné sur X : «Le monde à l’envers ! Sébastien Delogu dénonce avec des documents des malversations et c’est lui qui est perquisitionné pour savoir d’où il a eu les documents. A Marseille, police et justice vivent dans un univers parallèle où n’existent pas de droits pour les lanceurs d’alerte et où on les perquisitionne plutôt que les mis en cause. Entre autres…»

Sébastien Delogu devrait en savoir plus ce vendredi après-midi : la police l’ayant convoqué, en audition libre, pour faire suite à la perquisition. «Je n’ai rien à me reprocher, je n’ai fait que mon devoir et je ne le regrette pas», affirme l’élu. Tout de même, l‘épisode a perturbé le programme initial du jour, censé marquer un nouveau pas dans la marche vers l’échéance municipale de l’an prochain à Marseille, pour lesquelles le député insoumis ne cache pas ses ambitions. «Les élections arrivent à grands pas, ça me donne beaucoup de force pour la suite des événements à venir», assure le Marseillais. «L’enquête» des parlementaires marseillais sera présentée en détail prochainement à l’Assemblée nationale.

Mise à jour à 22 h 08 avec les réactions de Sébastien Delogu.