Foi d’éditorialiste aux tempes grises, nous traversons une période de grand vide politique. Ou, tout du moins, une période au cours de laquelle les organisations et les institutions politiques n’arrivent plus à traduire les mouvements de fond de la société. Une révolution des rapports humains est en train de s’opérer avec la remise en cause, enfin radicale et tous azimuts, de la domination masculine. Une révolution aussi du rapport entre l’homme et la nature, donc une révolution de nos modes production et de consommation (organisée ou subie) qui va transformer nos paysages, nos villes, nos déplacements, notre alimentation. Nous vivrons, d’ici quelques décennies, peut-être quelques années, dans un tout autre pays, sous d’autres climats. Les mutations auxquelles nous allons assister sont vertigineuses. Elles impliquent de faire des choix, c’est-à-dire de la politique. Et nous n’arrivons pas, collectivement, à organiser un grand débat national entre partis politiques qui, traitant de ces sujets, proposeraient des visions, des chemins différents. Ecoutons Bruno Latour qui, justement, évoquait le blocage généralisé dans Nous n’avons jamais été modernes (La Découverte, 1991) : «Que faire si nous ne pouvons plus avancer ni reculer ? Déplacer notre attention. Nous n’avons jamais ni avancé ni reculé. Nous avons toujours trié
Le billet de Thomas Legrand
Du haut de Latour, le vertige du vide politique
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Le philosophe, anthropologue et sociologue Bruno Latour à Paris en février 2021. (Joel Saget/AFP)
par Thomas Legrand
publié le 21 octobre 2022 à 8h30
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