C’est une menace à laquelle le gouvernement commence à être habitué. Lundi 14 avril, les responsables du Rassemblement national (RN) et de La France insoumise (LFI) se sont dits prêts à voter une motion de censure sur la prochaine loi de finances si la potion concoctée par Bercy et Matignon se révélait trop amère. Dimanche, le ministre de l’Economie et des Finances, Eric Lombard, a chiffré l’«effort supplémentaire» à «40 milliards d’euros» pour le budget 2026.
«Si l’idée c’est de demander aux Français de se serrer la ceinture une fois de plus, sans que l’Etat lui-même ne fasse des économies en matière d’immigration, de train de vie de l’Etat et des collectivités, eh bien nous nous emploierons à le censurer», a ainsi prévenu le vice-président du RN Sébastien Chenu sur Europe 1 et CNews.
Analyse
«Nous sommes prêts, dans les prochains jours, à déposer une nouvelle motion de censure», a renchéri le coordinateur de LFI, Manuel Bompard, sur BFM TV et RMC. «Mais comme nous n’avons pas des motions de censure de manière illimitée, nous ne sommes prêts à déposer cette motion que si on a une garantie qu’au moins les députés de gauche la votent», a-t-il ajouté, en visant les socialistes. Ces derniers n’avaient pas voté les motions de censure déposées par LFI début février, après le déclenchement de deux 49.3 par le Premier ministre, François Bayrou, sur le projet de loi de finances (PLF) 2025 et le budget de la Sécurité sociale (PLFSS).
Cette fois, en l’absence de contribution des plus aisés, «oui, il y aura censure», a assuré Olivier Faure ce lundi soir, sur le plateau de BFMTV. Car, selon lui, la pérennisation de la contribution différentielle sur les plus hauts revenus (CDHR), avancée par Eric Lombard, «ne suffit pas», «ce n’est pas à la hauteur du moment». Le Premier secrétaire du Parti socialiste a rappelé la taxe Zucman, votée par les députés mais pas les sénateurs, qui pourtant «rapporterait beaucoup plus».
«Il faut que cet effort soit soutenable ou calibré»
Dimanche, Eric Lombard avait également précisé que le gouvernement excluait toujours des hausses d’impôts et, donc, que cet «effort» passerait «essentiellement» par des économies, afin d’atteindre son objectif de déficit public de 4,6 % du PIB en 2026. «Nous ferons les ajustements qu’il faut. […] Il est hors de question d’augmenter les impôts», avait assuré le ministre, préparant le terrain au chef du gouvernement. Ce mardi, François Bayrou organise ainsi à Matignon un premier «comité d’alerte du budget», suivi d’une conférence de presse, destinés à alerter «les Français» sur ce que le Premier ministre estime être les «pathologies» financières du pays. 40 milliards d’euros, «c’est une marche très haute, mais nous n’avons pas le choix, c’est une affaire de souveraineté», a poussé le président du groupe Modem, Marc Fesneau, sur la matinale de Public Sénat, lundi.
Cet objectif d’économies est vivement critiqué à gauche pour son impact possible sur la croissance, déjà affaiblie par le contexte autour des droits de douane américains. «Cela ne sert à rien d’annoncer des objectifs dont on sait qu’on aura des difficultés à les atteindre, sauf à faire des impôts massifs ou des économies récessives, a ainsi jugé l’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve sur France 2. La fiabilité de la signature de la France, ça suppose qu’on fasse un effort, mais il faut que cet effort soit soutenable et calibré de telle manière à ne pas aboutir à une récession supplémentaire de celle résultant du contexte international.»
Mise à jour : à 21 h 41, avec l’ajout de la déclaration d’Olivier Faure.