Thierry Mariani a trouvé son mantra de second tour : «Vous voyez Louis Aliot à Perpignan ? On est dans la même configuration, soutient-il. En face, on a un candidat qui a réussi à agglomérer tous les soutiens derrière lui et nous, avec une forte abstention, on a une réserve d’électeurs importante. Donc tout est possible.» Ce n’est pas le marché de Perpignan, ville ravie en duel par le Rassemblement national (RN) en 2020, mais celui d’Aix-en-Provence que Mariani doit arroser de tracts ce mardi matin. Objectif rameuter les électeurs, après une abstention record lors du premier tour des régionales qui a particulièrement nui à ses troupes, arrivées certes en tête avec 36,4 % mais pas si loin de son désormais unique adversaire Renaud Muselier (31,9 %), et surtout pas autant que les 40,5 % ramassés par Marion Maréchal en décembre 2015.
Soirée électorale volée
La faute à «Monsieur Macron qui, au lieu d’inciter les gens à aller voter, reçoit Justin Bieber», raille l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy devant les caméras. La faute aussi, selon lui, aux sondeurs qui l’ont annoncé si haut durant des semaines que ses électeurs n’ont pas jugé nécessaire de se déplacer. Les mêmes sondeurs qui, avec leurs chiffres de sortie des urnes le donnant au coude à coude avec Renaud Muselier, lui ont «volé» sa soirée électorale. «On a commencé avec TF1 qui nous annonçait que le candidat LR était devant et le lendemain on finit à plus quatre points, peste-t-il. A chaque fois, on est sous-estimés alors qu’à l’arrivée, Renaud Muselier est le seul président sortant de région qui arrive deuxième.»
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Ledit Muselier qui, toujours selon Mariani, «après les amis de Monsieur Macron, a réussi à avoir derrière lui les socialistes, les communistes, les écologistes». Décidément, c’est une entame de semaine contrariante pour la tête de liste de Marine Le Pen, qui plaçait tant d’espoir en lui : outre un score qu’il refuse de voir comme décevant, la décision de Jean-Laurent Félizia, la tête de liste de l’union des gauches, de finalement retirer la liste lundi soir, élimine la perspective d’une triangulaire où les sondages le donnaient gagnant à tous les coups. «Le courage et les convictions de Jean-Laurent Félizia n’auront duré qu’une matinée, c’est déjà mieux que Castaner en 2015, ironise Thierry Mariani. La gauche est en train de se suicider une deuxième fois en appelant à voter pour le candidat de Monsieur Macron. Je me tourne vers ceux qui ne sont pas allés voter. Il y a une chance de gagner. Regardez Perpignan !» «Vous n’en avez pas marre de dire des conneries ?» lui lance, dans son dos, un homme éméché.
«Aucune correction, aucune élégance»
La procession marianiste se lance ensuite à travers les étals. L’accueil est poli, sans plus, en ces terres LR solidement tenues par Maryse Joissains, dont la fille, candidate sur la liste de Renaud Muselier, tracte aussi juste à côté. «Je regrette d’être du canton 1, je ne peux pas voter pour vous !» s’excuse une dame auprès de Thierry Mariani. «Mais si vous pouvez ! C’est les régionales Madame, pas les départementales…» Une autre cliente se plaint de la propreté à Aix. Un autre, encore, dit non merci, il vote dans le Vaucluse. Côté information sur l’élection, il y a encore du boulot… A quelques interpellations encourageantes près, les Aixois préfèrent se concentrer sur leurs tomates, la tournée de campagne ne durera pas plus d’une heure. «On prend un café ?» suggère Mariani qui a envie d’une cigarette. «Demain, j’avais prévu d’aller à Valréas», raconte-t-il. Pour répondre à Renaud Muselier qui, avant le premier tour, avait organisé une journée dans la ville où Mariani a été maire pour dénoncer sa gestion calamiteuse. «Aller là-bas tel un petit caïd de banlieue, j’ai trouvé ça très agressif gratuitement. La meilleure réponse, c’est que les gens y ont voté à 47 % pour moi alors que le maire est sur les listes de Muselier. Alors je n’ai pas besoin d’y aller.» L’épisode, il ne le «pardonnera jamais» à son ex-ami. «Aucune correction, aucune élégance, balaie-t-il. Moi, j’ai très modérément parlé de son passeport mauricien.» Référence aux investissements réalisés à l’île Maurice par son adversaire.
Il raille au passage les rumeurs qui annoncent que leur ancien mentor commun, Nicolas Sarkozy, pourrait envoyer un message de soutien au candidat LR. «Sarkozy est intelligent, il n’a aucun intérêt à venir ici, affirme celui qui fut, comme Muselier, son ministre. Il ne va pas venir soutenir la seule liste dont Macron peut se prévaloir…» Une télé l’attend pour un duplex. Cet après-midi, rien n’est prévu à l’agenda, en tout cas face caméra. Il ne lui reste pourtant que trois jours pour motiver les foules. Un débat chez Jean-Jacques Bourdin, un dernier meeting sûrement à Fréjus (Var) dans les jours à venir et puis ce sera déjà la fin de la campagne officielle. «On peut gagner, je suis déterminé», répète-t-il encore pour se convaincre. Comme à Perpignan.