Dix années que Denise, 54 ans, n’avait pas franchi le seuil d’un Pôle Emploi. A la sortie de son entretien, à Cenon, une commune limitrophe de Bordeaux, l’ancienne DRH pousse les portes, l’air assommé, un épais dossier cartonné sous le bras. Elle s’y accroche. Toute sa vie professionnelle, ses projets, ses aspirations sont résumées méthodiquement dans cette pile de feuilles A4. «Avant de partir, j’ai géré une dizaine de départs. A la fin, ça a été mon tour», lâche-t-elle pudiquement. Denise raconte comment son entreprise a été rattrapée par la crise. En attendant de retrouver un poste dans un secteur où «la demande est bien plus élevée que l’offre», elle a le sentiment d’«entrer dans le flou». «A l’image de ces élections présidentielles», raille la quinquagénaire qui aimerait «un leader charismatique» capable de lui «redonner foi en l’avenir». Car si en 2017, elle avait peu hésité avant de donner son bulletin à Emmanuel Macron, cette année, elle sait déjà qu’aucun candidat n’aura son vote.
«J’ai épluché tous leurs programmes, toutes leurs déclarations. La campagne n’est qu’à ses débuts, mais je ne vois que des candidats qui se construisent dans l’opposition aux autres, dans l’exagération. Aucun ne parle d’un avenir joyeux, aucun ne me redonne espoir», déroule Denise, qui semble soudainement s’animer au milieu de la rue. Derrière elle, un demandeur d’e