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Libération
Réactions

Après l’attentat d’Arras, droite et extrême droite s’empressent de faire le lien avec «l’immigration de masse»

Le RN a fait un lien immédiat entre l’attaque terroriste, l’immigration et l’islamisme en concentrant ses attaques sur Gérald Darmanin dont Jordan Bardella a exigé la démission. Pas en reste, le président de LR Eric Ciotti a demandé le retour de «l’état d’urgence» en pointant aussi immigration et régularisations.
Le président du RN, Jordan Bardella, le 12 octobre à Paris. (Ludovic Marin/AFP)
publié le 13 octobre 2023 à 19h41

Sitôt connus les premiers éléments du profil de l’homme interpellé après l’attaque d’Arras, la droite et l’extrême droite ont d’une même voix mis en cause la responsabilité du gouvernement, coupable, selon eux, de d’indolence sur les questions sécuritaire et migratoire. «Le terroriste d’Arras était un fiché S étranger, dont la famille aurait dû être expulsée en 2014, qui n’aurait pas dû être sur notre sol», s’est indigné le président du Rassemblement national sur Twitter (renommé X), en référence à l’origine ingouche du suspect. Avant de demander la démission de Gérald Darmanin : «Il y a eu des failles dans toute la chaîne de responsabilités, qui devraient conduire à la démission immédiate du ministre de l’Intérieur.» Le groupe RN à l’Assemblée nationale a exigé d’auditionner le résident de la place Beauvau, estimant qu’il «doit maintenant rendre des comptes et répondre de son action».

Le patron de Les Républicains (LR), Eric Ciotti a quant à lui demandé à Emmanuel Macron «d’activer l’état d’urgence», en mobilisant les réservistes de la police et de la gendarmerie. «N’attendons pas que la France soit touchée plus durement, il faut agir de façon préventive, a poursuivi le même. Face à l’islamisme et à l’immigration de masse qui contribue à l’alimenter, le gouvernement ne doit plus trembler.» L’analyse liant l’attentat à l’immigration est indistinctement partagée par la droite dure et l’extrême droite. «Il y a bien entendu un lien évident entre le meurtre que nous pleurons aujourd’hui, l’immigration massive dans notre pays, et l’absence de lutte efficace contre l’islamisme radical», a soutenu Edwige Diaz, députée RN de la Gironde, au sein de l’hémicycle, vendredi 13 octobre. Sur BFMTV, son collègue de l’Eure Kévin Mauvieux a déploré le projet de loi sur l’immigration, porté par Darmanin et prévu dans les prochaines semaines «qui prévoit des régularisations massives», sans rappeler que le suspect était demandeur d’asile et que le texte gouvernemental n’aborde pas ce statut.

Zemmour toujours plus loin, Le Pen prudente

Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, Eric Zemmour, chef du parti Reconquête, est comme toujours allé plus loin, amalgamant immigration, terrorisme et islam – et non pas islamisme, qu’il conçoit comme un synonyme de la religion musulmane. «Arrêtons l’immigration, interdisons les Frères musulmans, expulsons les fichés S islamistes, ne cédons plus un centimètre de terrain à l’islamisation de notre pays», a tancé l’ancien candidat à la présidentielle. A l’unisson avec le RN et LR, qui demandent régulièrement l’expulsion des fichés S étrangers.

Prenant son temps, Marine Le Pen a émis en fin d’après-midi un communiqué au ton prudent. «Si l’enquête en cours apportera les éléments permettant de confirmer la motivation du terrorisme islamiste, cette nouvelle attaque au cœur de l’école de la République suscite l’effroi et nous rappelle combien notre pays est la cible permanente du terrorisme islamiste, de ce fanatisme meurtrier dont le seul but est notre soumission et notre asservissement», écrit-elle, invitant à «mettre hors d’état de nuire les terroristes et neutraliser tous ceux qui par faiblesse, par complaisance ou par calcul contribuent à la propagation de l’idéologie islamiste».

Mise en cause de la gauche

Comme toujours, l’extrême droite voit dans les associations et les partis de gauche des complices du terrorisme. «L’extrême gauche prendra toujours le parti de ceux qui œuvrent contre notre pays et notre civilisation […] Ne nous y trompons pas : soyons conscients qu’ils se rangeront toujours du côté de ces bombes humaines jihadistes à retardement présentes sur notre sol», a attaqué le député RN du Var Frank Giletti, visant la mobilisation du Parti communiste en 2014 en faveur de la famille du suspect, âgé à l’époque de 9 ans, menacée d’expulsion. «Il est temps d’ouvrir les yeux sur cette cinquième colonne du terrorisme islamiste qui nous attaque de l’intérieur. Et le moment est venu de demander aussi des comptes à ses amis de l’extrême gauche qui en sont la vitrine légale», menace de son côté Laurent Wauquiez, président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes, dans une similitude de vocabulaire frappante avec le nouveau sénateur RN de Seine-et-Marne, Aymeric Durox, exigeant que «la cinquième colonne islamiste soit éradiquée».

Cette mise en cause de la gauche se double d’une explication personnelle pour le RN. Vendredi, Marine Le Pen a été condamnée à verser 500 euros à la Cimade pour avoir estimé que les associations humanitaires étaient «parfois» «complices des passeurs». Même si les propos de la députée concernaient la situation à Mayotte, le maire de Perpignan, Louis Aliot, a profité de l’attentat pour régler les comptes de sa patronne et ex-compagne. «Le jour où les associations immigrationnistes sont pointées du doigt pour avoir entravé l’expulsion du terroriste tchétchène et sa famille, Marine Le Pen est condamnée pour diffamation envers la Cimade […]. C’est une honte !» a tonné le vice-président du RN. Qui n’a pas l’air de trouver déshonorant d’assimiler la Cimade au terrorisme islamiste.