«Vive la France !» En une de son édition du jour, le quotidien grec Esfyn laisse exploser sa joie et s’exclame en français. Après avoir choisi comme photo une place de la République bondée, joyeuse (certains observateurs diront qu’elle est très proche de la une de Libé), le journal grec célèbre, dans une analogie footballistique déjà maintes fois utilisée, «une remontada historique de la coalition des forces de gauche».
Selon les résultats définitifs, publiés dans la nuit par le ministère de l’Intérieur, le Nouveau Front populaire (NFP) a remporté 182 sièges, devant la macronie (168). L’alliance entre le Rassemblement national (RN) et la ligne ciottiste de LR n’arrive qu’en troisième position, avec 143 députés élus. Une déroute du parti d’extrême droite que l’on doit à la surprise créée par le front républicain que l’Orient-le Jour a choisi de célébrer. Le quotidien libanais se réjouit ce matin d’une «France [qui] relève le front !»
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📌 La France relève le front !
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«La France a dit non à l’extrême droite», résume El País, soulagé de ne pas voir l’extrême droite au pouvoir et surpris de la victoire de la gauche. Le quotidien espagnol mesure, comme la France, la force de ce nouveau «cordon sanitaire mis en place par la gauche et le centre du président Macron, qui a permis de vaincre de façon décisive le RN de Marine Le Pen» qui «était pourtant favori», après avoir obtenu 33 % des voix au premier tour dimanche dernier. Le choix du journal belge la Libre est tout autre. Au front républicain, le quotidien préfère un Jean-Luc Mélenchon victorieux, campé sur ses deux appuis. «Contre toute attente, la gauche met l’extrême droite en échec», titrent nos confrères belges.
Photo pleine page de Jean-Luc Mélenchon près de l'eurodéputé Younous Omarjee en une de La Libre Belgique : « Contre toute attente, la gauche met l'extrême droite en échec ». pic.twitter.com/Grp5dgcNH8
— Sylvain Ernault (@SylvainErnault) July 8, 2024
«Révolution française», titre pour sa part le journal italien la Repubblica. «Le second tour a balayé toutes les prévisions, c’est le front des gauches qui s’impose», se réjouit ce quotidien progressiste, qui salue néanmoins le fait qu’en arrivant deuxième, «Macron a gagné son pari».
«Quel bordel»
Mais les réjouissances n’ont qu’un temps. De ces résultats est née une nouvelle Assemblée nationale «fortement divisée», constate le New York Times. La nouvelle Chambre basse dans laquelle «aucune coalition gouvernementale ne semble immédiatement envisageable» devrait entraîner «des mois d’incertitudes», prédit le quotidien américain, dans une France qui «a l’air presque ingouvernable, avec les Jeux de Paris qui s’ouvrent dans moins de trois semaines».
«Le système politique français semble épuisé, tranche quant à lui le titre portugais Público. La bipolarisation aux extrêmes provoquée par cette crise nécessite une reconfiguration du système.» Et si l’immobilisme s’éternise, il contribuera, «une fois de plus, au discrédit du système politique et créera les conditions favorables au redressement rapide de Marine Le Pen», avertit le titre portugais. «Quel bordel», résume bien plus simplement le quotidien italien Libero Quotidiano sur sa première page du 8 juillet, en manifestant sa surprise face au résultat des urnes.
Macron «sur le siège arrière»
Peut-être que la France devra s’inspirer de l’exemple belge et de son histoire politique aux multiples coalitions. La Libre nous y invite, poussant un ouf de «soulagement aussi intense que bref, car nos voisins [français] devront réapprendre à négocier entre partis». Fort d’une expérience nationale, le quotidien francophone prévient que «dès ce lundi, les élus de la République devront chercher des alliances contre-nature pour éviter la paralysie» et annonce une «nouvelle ère politique» qui «aurait pu s’ouvrir dès que la macronie ne disposait plus de majorité absolue». Avant d’assener : «C’était en 2022. Quel temps perdu ! Quel gâchis !»
La légitimité d’Emmanuel Macron à l’international en prend un coup. Quelques jours avant que le président français ne se rende au sommet de l’Otan, The Times se livre à son autopsie politique. Celle d’un dirigeant qui a «appuyé sur le bouton nucléaire de la dissolution», «désormais réduit à l’impuissance» car «le macronisme a fait son temps». Le voici condamné à être assis «sur le siège arrière» de la voiture «pour les trois dernières années de son mandat». Plus simplement et plus moqueur, le quotidien catalan la Vanguardia scelle le sort d’Emmanuel Macron : «C’est la fin de l’hyperprésidence de Jupiter.»