Guéret, dans la Creuse, un mercredi. La rue piétonne déserte. Des employés par grappes s’enfilent un menu ouvrier sous la véranda du Pub Rochefort. Il y a du monde chez les libraires. Au Fil des pages, on a mis en vitrine une enquête sur le renouveau de l’extrême droite radicale, Drapeau noir, jeunesses blanches (éditions du Seuil) ; aux Vies minuscules, on vend encore le chef-d’œuvre de Joseph Ponthus, A la ligne.
Il y a un barouf devant le bâtiment de l’inspection académique. Une vingtaine de personnes sont là, dont certaines portent l’écharpe tricolore, et des gosses. Ça souffle dans des cornes de chasse, on tape sur des casseroles. Sur une pancarte : «On est les oubliés, la campagne, les paumés, les trop loin de Paris, le cadet de leurs soucis», comme dans la chanson de Gauvain Sers.
Parmi les présents, Daniel Malleret, 70 ans, est le maire de Lussat, petit village situé à une quarantaine de kilomètres d’ici. Maire «démissionnaire», parce qu’il y a quelques jours, lui et ses conseillers municipaux ont tous rendu leur tablier, pour protester contre la future carte scolaire. Quelqu’un a décidé qu’il fallait fermer des écoles en Creuse, une question de principe, et marqué sur une feuille le barème pour appliquer la sentence : 15 élèves. En dessous, rideau. Manque de pot pour Lussat, sa classe unique n’accueille que douze gam