Menu
Libération
Primaire ?

De Jean-Luc Mélenchon à Arnaud Montebourg, l’union de la gauche en question

Election Présidentielle 2022dossier
Après l’appel de la candidate socialiste Anne Hidalgo à une primaire et la main tendue du partisan de la «Remontada», les différents candidats vont devoir se positionner.
Anne Hidalgo, Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Fabien Roussel et Arnaud Montebourg. (Stéphane Lemouton/ABACA // Marc Chaumeil/Libération // Boby/LIbération // Stéphane Le Tellec/ABACA // Cyril Zannettacci/Libération)
publié le 8 décembre 2021 à 21h37

On pensait que cette histoire d’union de la gauche était loin derrière nous. Chaque candidat dans son couloir avec la mort au bout. Mercredi soir, les choses ont un peu changé : les prises de paroles d’Anne Hidalgo et d’Arnaud Montebourg remettent le débat sur la table. Un rassemblement ? Lequel ? Une primaire ? Petit tour des positions.

Jean-Luc Mélenchon

Jean-Luc Mélenchon candidat à la primaire ? On se marre. Le candidat de La France insoumise (qui navigue entre 8 et 11 %) regarde tout ça de loin, très loin. Il ne fait même pas semblant. L’ancien socialiste n’a jamais été tenté par cet exercice. La question revient à chaque présidentielle et il l’expédie systématiquement. On a échangé à plusieurs reprises avec lui. Jean-Luc Mélenchon reste sur sa ligne : «Je suis contre la tambouille. Pourquoi je participerais à une primaire alors qu’on ne pense pas pareil. Est-ce qu’ils veulent sortir des traités européens ? Est-ce qu’ils sont pour une VIe République ? Est-ce qu’ils veulent sortir du nucléaire ? Ça ne sert à rien de participer à un machin en sachant que personne ne respectera sa parole à la fin.» Le candidat insoumis a sorti une nouvelle bannière de son chapeau. Elle se nomme l’Union populaire. Comprendre : réunir les électeurs à la base. Jean-Luc Mélenchon espère refaire le coup de 2017 – quand il a flirté avec le second tour. Les discussions de l’autre côté de la gauche l’amusent. Il guette les scènes minutieusement, taquine et souligne les différences entre les uns et les autres en espérant que le brouillard et les tractations le rendent plus fort aux yeux des électeurs. Un soir d’octobre, dans son bureau, Jean-Luc Mélenchon regardait les choses ainsi : «Nous sommes bien, nous avons notre programme et nous sommes solides, mais le centre gauche, les écologistes et les socialistes, ils ne peuvent pas continuer comme ça, tôt ou tard, ils devront bien se mettre d’accord. Mais pour nous, ça ne change rien.»

Yannick Jadot

Un petit coup d’œil en arrière. Yannick Jadot était à fond lors de la dernière présidentielle. Il avait traversé tout le pays pour mettre au monde une primaire qui rassemble toutes les couleurs de la gauche. Un échec. Les socialistes ont organisé leur primaire dans leur coin, les écologistes aussi. Les deux vainqueurs se sont retrouvés quelques mois plus tard. Nouvel échec. Benoît Hamon et Yannick Jadot ont réalisé un petit 6 %. Le candidat écologiste a juré la main sur le cœur que c’était terminé pour lui. Plus de primaire. Mais son parti lui a imposé une nouvelle fois l’exercice pour cette présidentielle : il a battu sur un fil la surprenante Sandrine Rousseau. Un petit coup d’œil dans le présent. Les écologistes expliquent aux uns et autres qu’il y aura un candidat vert sur la ligne de départ. Et qu’il se nomme Yannick Jadot (environ 8 % dans les sondages). Une primaire qui rassemble toute la gauche ? Les écolos ricanent. Pas question, disent-ils. Le candidat nous confiait récemment : «L’heure est à l’écologie et à la clarté, la dernière présidentielle a prouvé que les candidats ne s’additionnent pas. Nous sommes favorables à un large rassemblement derrière notre candidature.» Comprendre : tout le monde derrière le grand Jadot. Un coup d’œil dans le futur : imaginons qu’une primaire prenne réellement forme. Les écologistes pourront-ils résister à la pression populaire ?

Fabien Roussel

Les communistes sont embêtés. Ils veulent le beurre et l’argent du beurre. Le beurre : une candidature en solitaire à la présidentielle. L’argent du beurre : une large union de la gauche aux législatives. Pas simple l’exercice. On se fait la baston en avril et des papouilles en juin. Pourquoi cette stratégie ? Ils ne voulaient plus marcher main dans la main avec Jean-Luc Mélenchon. Ils ont mené les deux dernières batailles avec lui, en 2012 et en 2017, mais l’ambiance s’est dégradée. Des désaccords et de la rancœur. Comment faire aujourd’hui ? Fabien Roussel (crédité de 1 à 2 %) pourrait postuler à une primaire mais pas sûr que les militants communistes acceptent de se retrouver en tête à tête avec les socialistes. Mercredi soir, un élu du PCF sur le mode de la taquinerie, dessinait son monde de rêve : «On souhaite imposer nos idées dans le débat et notre candidature peut nous le permettre. Après, demain ou après-demain, si toute la gauche se retrouve pour une primaire et qu’on signe un accord aux législatives… on sera prêt à tendre la main.» Il reste encore un peu de boulot.

Arnaud Montebourg

L’homme a plusieurs visages. L’ancien socialiste s’est lancé dans la présidentielle en septembre avec un slogan choc : «La Remontada.» Quatre mois sont passés et il est toujours au ras du sol, autour de 2 %. La campagne ne décolle pas. Pire, les bisbilles en interne sur la ligne et les luttes d’influences prennent toute l’énergie. Arnaud Montebourg ne se retrouve pas dans la gauche d’aujourd’hui. Le seul qui trouve grâce à ses yeux ? Le communiste, Fabien Roussel. La semaine passée, Arnaud Montebourg n’envisageait pas un instant une union avec les autres têtes de gauche. Qu’est ce qui a changé ? Lundi, on a croisé sa route, par hasard, près de la Gare de Lyon. Il était en route pour le conseil national de «la Remontada». Il s’est arrêté un instant : «Vous avez vu le discours de Zemmour dimanche ? Et la violence ? On ne peut pas rester comme ça.» Mercredi soir, quelques minutes avant la prise de parole d’Anne Hidalgo, il s’est dit «prêt à offrir» sa candidature à «un projet commun». Comprendre : c’est la grande «uniontada» !