Le jour d’après. Quelques heures après le premier tour des élections législatives qui a vu le parti présidentiel s’imposer de justesse avec 25,7 % des suffrages contre la gauche unie et ses 25,6 % des voix, voilà la campagne d’entre-deux-tours qui débute. Quelle en sera la teneur ? Tout porte à croire que la macronie va continuer de pilonner les Insoumis pour tenter d’affaiblir la Nupes et espérer obtenir une majorité confortable à l’Assemblée, ce qui est très loin d’être acquis. Les premiers déplacements de campagne, notamment de la Première ministre Elisabeth Borne dans le Calvados, reprennent dès ce lundi.
Mélenchon appelle les jeunes abstentionnistes à se bouger. «Je veux juste dire aux jeunes qu’il faudrait quand même qu’ils se mêlent un peu de leurs affaires», a lancé Jean-Luc Mélenchon sur France 2, dans un appel aux jeunes qui se sont abstenus au premier tour de l’élection législative. «Ce n’est pas la peine de venir râler sur Parcoursup pour finalement ne pas voter pour ceux qui veulent l’abolir. Et puisque nous partageons le soucis de la planète, c’est le moment d’envoyer des gens à l’Assemblée nationale qui vont s’y prendre pour de bon et pour de vrai.»
Pas de retraite en vue pour Mélenchon. Répondant à une question d’Anne-Sophie Lapix sur son avenir, Jean-Luc Mélenchon a démenti toute velléité de sortie de scène. «Ce serait contre ma nature si on ne m’entendait plus. Je serai Premier ministre si nous avons la majorité et sinon je continuerai mon combat politique.»
Des chiffres «tripotés» pour «masquer que LREM a subi une lourde défaite», critique Mélenchon. Le leader de la Nupes, Jean-Luc Mélenchon, invité sur France 2, estime que le ministère de l’Intérieur «essaie de tripoter les chiffres», «pour masquer que LREM a subi une lourde défaite et répandre l’idée que nous ne pouvons pas y arriver». «Si, nous pouvons y arriver», répond Mélenchon. Ce dernier critique dans le même temps une campagne pendant laquelle il a été «impossible» d’avoir des débats «sur la retraite, le RSA ou sur l’eau» et souligne que le plus grand parti du pays, «c’est l’abstentionnisme». «On peut penser qu’on y a une chance de les convaincre.»
Laurent Berger appelle à la clarté face à l’extrême droite aux législatives. Le secrétaire général de la CFDT a appelé lundi à Lyon à voter pour les candidats opposés à l’extrême droite aux législatives, fustigeant au passage le manque de clarté de la classe politique et notamment de la majorité. «A chaque fois qu’il y a un candidat d’extrême droite en position de gagner l’élection, la CFDT appelle à voter pour la candidate ou le candidat du camp d’en face, quel qu’il soit et sans que cela nous lie à son programme», a déclaré Laurent Berger à la tribune du 50e Congrès de la Confédération. «Le courage, c’est de dire clairement pour qui il faut voter pour battre l’extrême droite. Alors vous, les femmes et les hommes politiques, de gauche, de droite ou ni de gauche ni de droite, un peu de courage dans cette période pour battre le Rassemblement national», a aussi dit le secrétaire général.
Dans le Calvados, Borne montre le chemin du second tour à une macronie déboussolée. Deux heures montre en main, une nuée de caméras et une Première ministre à l’œuvre pour extirper une macronie engluée dans des positions contradictoires. Au lendemain du premier tour des élections législatives, qui a vu le camp présidentiel se hisser devant la gauche unie, la cheffe du gouvernement a réinvesti le terrain ce lundi. Candidate dans la 6e circonscription du Calvados, où elle est arrivée en tête (34 %) dimanche soir devant le jeune candidat de la Nupes Noé Gauchard (24 %), Elisabeth Borne est en position de force pour prolonger son bail à Matignon. Mais face à une alliance de gauche titillant la majorité présidentielle en nombre de suffrages au niveau national, Borne entend montrer l’exemple. A Condé-en-Normandie, où elle est arrivée en milieu de matinée, la candidate a donc souhaité «mobiliser» et «aller à la rencontre des Français et des Françaises». Lire notre reportage.
Le député sortant Alexandre Freschi va se retirer. Dans la deuxième circonscription, à Marmande, l’eurodéputée RN Hélène Laporte, en tête du scrutin (30,5 %) devait affronter dimanche prochain dans une triangulaire le maire de Virazeil Christophe Courrelongue (Nupes-PS, 26 %) et le député sortant Alexandre Freschi (ENS-Renaissance, 25,6 %), au coude-à-coude. Mais ce dernier s’apprête à se retirer de la course, selon une information du quotidien Sud Ouest, afin de faire barrage au Rassemblement National (RN).
LR sera une «opposition utile», assure Jacob. Si LR n’a encore aucune certitude quant aux nombres de sièges qu’il pourra grappiller à l’issue du second tour dimanche prochain, son patron Christian Jacob dit en avoir une : dans la future législature, LR ne sera «en aucun cas une force d’appoint» de la majorité mais «une opposition déterminée mais utile, pas dans le blocage des instituions et pas dans les outrances», annonce-t-il à l’issue d’un comité stratégique. Il promet de «voter et amender les réformes qui vont dans bon sens» mais de «s’opposer durement a celles qui vont à contresens de ce que l’on souhaite et à l’intérêt du pays». S’il n’envisage «pas des accords» avec la macronie, Christian Jacob s’est dit certain que LR sera «en situation» d’incarner cette opposition utile, assurant qu’avec le relais du Sénat «nous pouvons jouer ce rôle déterminant».
Des triangulaires serrées dans huit circonscriptions. Il s’agit là d’une complexité du code électoral français : lors des élections législatives se qualifient pour le second tour les deux candidats arrivés en tête… ainsi que tous ceux ayant dépassé le seuil des 12,5 % d’inscrits au premier tour. Sauf en cas de désistement de certains, huit circonscriptions devraient voir s’affronter trois candidats lors du second tour de ce dimanche 19 juin. Le premier tour de l’élection présidentielle a fait émerger trois blocs politiques dominants : un de centre droit, un de gauche radicale et celui d’extrême droite. C’est tout naturellement que nous les retrouvons dans la plupart des circonscriptions où vont se jouer des triangulaires. Les rapports de force ne sont toutefois pas les mêmes. Le point circonscription par circonscription.
Les quatre insoumis élus déjà dans les murs de l’Assemblée nationale. Quelques heures seulement après avoir assuré leur siège dès le premier tour des législatives, les quatre députés insoumis sont venus à l’Assemblée nationale ce lundi récupérer leurs écharpes tricolores et faire le tour des lieux. Une première pour Sophia Chikirou et Sarah Legrain, élues à Paris, tandis que Danièle Obono (Paris) et Alexis Corbière (Seine-Saint-Denis) vont débuter un deuxième mandat. Ils ont été accueillis dans la cour d’honneur avant de visiter les lieux et de récupérer leurs mallettes contenant écharpe tricolore et règlement de l’Assemblée nationale. L’autre député - cette fois macroniste - élu dès le premier tour en Mayenne, Yannick Favennec, viendra mercredi au Palais-Bourbon.
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Richard Ferrand, adepte de la veste retournée. On savait les macronistes peu regardants sur les changements soudains de position, mais cette fois, le Président de l’Assemblée nationale fait fort. Dans l’entre-deux-tours de la présidentielle, au moment où les voix de la gauche étaient les bienvenues pour faire gagner Emmanuel Macron, Richard Ferrand jurait qu’en dépit «d’idées différentes», les électeurs de Jean-Luc Mélenchon et ceux d’Emmanuel Macron partageaient «des valeurs communes». Un mois et demi plus tard, brutal changement de pied. «Nous avons des valeurs diamétralement différentes», martèle désormais le même Ferrand. Il faut dire qu’entre-temps, les insoumis sont devenus de sérieux adversaires. Dans sa circonscription du Finistère, Richard Ferrand affrontera Mélanie Thomin, candidate de la Nupes. L’écart n’est que de deux points.
Mélenchon fustige les «tripatouillages» de LREM quant aux résultats du premier tour. La gauche n’en démord pas : elle est sous-estimée dans les résultats fournis par le ministère de l’Intérieur. «C’est clair qu’il y a un doute sur ce que fait Darmanin avec les résultats. Tout le monde comprend que ce sont de mauvais perdants. On ne peut pas avoir des mœurs de République bananière», s’agace Jean-Luc Mélenchon cet après-midi, devant le siège de la France insoumise à Paris. Il accuse le ministre de «tripatouillages». Le chef des députés LREM Christophe Castaner, plutôt que de répondre sur le fond, dénonce une «théorie du complot» venant des insoumis.
Le Parti animaliste voit sa cause progresser. Au lendemain du premier tour, le Parti animaliste, qui a obtenu 255 086 voix aux législatives et 1,5 % des suffrages, ne donne «aucune consigne de vote» mais «invite ses électeurs à prendre en compte les engagements des candidats qualifiés, sur la question animale, dans leur décision». Le parti qui met des animaux sur ses affiches fait mieux qu’en 2017, première élection où il avait obtenu 1,1 % des voix. Il bénéficiera une fois de plus des financements publics puisqu’il a réalisé un score de plus de 1 % dans au moins 50 circonscriptions. Sur Twitter, sa coprésidente et porte-parole Hélène Thouy se félicite : «Notre cause progresse, son influence ne cesse de croître et amènera d’autres avancées pour les animaux». Elle avait échoué à obtenir les parrainages nécessaires pour se présenter à l’élection présidentielle mais compte continuer à faire entendre sa voix singulière pendant le deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron.
Bravo et merci aux candidats et militants du @Partianimaliste d’avoir porté avec autant de dévouement partout en France la cause animale. Notre cause progresse, son influence ne cesse de croître et amènera d’autres avancées pour les animaux.Nous restons mobilisés et déterminés !
— Hélène Thouy (@HeleneThouy) June 13, 2022
Jean-Luc Mélenchon croit toujours à la victoire. «Matignon ne s’éloigne pas, Matignon se rapproche», déclare cet après-midi le chef de file de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), présent devant son QG à Paris. Les partisans de la coalition de gauche se réjouissent depuis dimanche des résultats du premier tour, qui les donnent au coude-à-coude avec la majorité présidentielle. Mélenchon, qui avait expressément aux Français de «l’élire Premier ministre», croit toujours en ses chances. Il demande une nouvelle fois aux électeurs de «déferler» aux urnes dimanche prochain. Un appel avant tout à destination des jeunes et des classes populaires. Un électorat qui est traditionnellement acquis aux idées de gauche mais qui peine bien souvent à se mobiliser. «Déferlez, c’est le moment où vous avez les pleins pouvoirs de tout changer», martèle l’insoumis. La grande majorité des circonscriptions verra s’affronter la Nupes à LREM.
De droite, de gauche, voire extrémiste : qu’est-ce que votre nourriture dit de vos idées politiques ? En cette semaine d’entre-deux tours, auteurs, cavistes, restaurateurs et historiens se prennent le chou dans les colonnes de Libé autour de l’identité politique des plats. Aujourd’hui : le jambon-beurre.
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Rachel Keke, du (r) balai. Depuis ce matin, Rachel Keke, candidate de la Nupes dans la 7e circonscription du Val-de-Marne, est la cible des attaques de l’ancienne ministre des Sports Roxana Maracineanu à qui elle va être opposée au second tour dimanche prochain. Il y a deux ans, Libé avait fait le portrait de cette femme de ménage syndiquée, franco ivoirienne, qui menait la grève de l’hôtel Ibis Batignolles. Jusqu’à la victoire. Lire son portrait.
Le premier tour célébré comme une victoire pour le RN. «La seule force politique en dynamique» : le cri de victoire de Jordan Bardella lundi matin, dont le parti n’arrive qu’en troisième position au premier tour des législatives, n’est pas totalement injustifié. Et pour cause : si le parti sous-performe (18,7 %) par rapport à son résultat au premier tour de la présidentielle (23,15 %), il engrange 1,2 million de voix supplémentaires par rapport aux législatives de 2017. Il installe ainsi 208 de ses candidats au second tour, contre 120 il y a cinq ans. Le RN est même présent au second tour de toutes les circonscriptions dans 18 départements. Les traditionnels bastions des Hauts-de-France : Aisne, Pas-de-Calais ; du Grand Est : Ardennes, Vosges, Aube, Haute-Marne, Meuse : et de la Bourgogne-Franche-Comté : Haute-Saône, Nièvre, Yonne, Territoire de Belfort. Dans le Sud, le RN confirme sa progression en Occitanie : outre ses fiefs des Pyrénées-Orientales et de l’Aude, le parti d’extrême droite réalise des grands chelems en Tarn-et-Garonne et dans le Lot-et-Garonne. Cartons plein également dans le Var et le Vaucluse.
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Pour le plaisir. Eliminé dès le premier tour ce dimanche, Eric Zemmour semble avoir autant d’avenir dans la députation que dans la voyance.
Je serai au second tour. Ensuite, je serai soit Président de la République, soit leader de l’opposition.#Elysee2022 #JeVoteZemmourLe10avril
— Eric Zemmour (@ZemmourEric) April 5, 2022
Aux législatives, les ex-LR s’en tirent bien. Les six députés sortants ayant quitté la rue de Vaugirard pour la macronie se sont tous qualifiés pour le second tour. Presque partout, leurs opposants du parti de droite sont largement recalés. Lire notre article.
La Première ministre contre le «premier menteur». Décidément, quand il s’agit de taper sur la Nupes et sur le tribun qui en est à sa tête, LREM a le sens de la formule. Devant les candidats du camp présidentiel réunis en visio-conférence, Elisabeth Borne s’en est prise, une fois de plus, à Jean-Luc Mélenchon : «Quand Jean-Luc Mélenchon prétend vouloir être Premier ministre, c’est surtout le premier menteur.» La locataire de Matignon en veut à l’Insoumis d’avoir assuré que son parti arrivait «en tête» dimanche alors que les résultats n’étaient encore que des estimations et qu’il serait «présent dans plus de 500 circonscriptions au second tour». Au final, la Nupes n’est présente «que» dans 357 circonscriptions, et selon le décompte du ministère de l’Intérieur, l’union de la gauche arrive derrière le camp Macron à 21 000 voix près. Ce décompte est néanmoins vivement contesté par la gauche car certains candidats de la Nupes n’ont pas été comptabilisés comme tels par la Place Beauvau.
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Elisabeth Borne, le jour d’après. Par notre photographe envoyé spécial à Condé-sur-Vire (Manche), Stéphane Lagoutte.