Le temps presse. Avant une très grosse séquence internationale loin de Paris (conseil européen, G7, sommet de l’Otan et sommet des océans), Emmanuel Macron reprend la main. Deux jours après le coup de tonnerre des législatives, le chef de l’Etat reçoit une brochette de responsables politiques à l’Elysée pour tenter de trouver une issue politique acceptable après des élections qui ont passablement chamboulé le paysage politique. Quid d’Elisabeth Borne ? Du remaniement ? De la recherche de «majorités d’action» ? Les questions s’empilent sur le bureau présidentiel.
Qui sera le prochain président de la commission finance ? Surtout pas un Insoumis implore Eric Woerth, élu pour la cinquième fois député de l’Oise mais cette fois dans le camp Renaissance, après avoir quitté Les Républicains. «les Insoumis ont visiblement en tête de faire du contrôle fiscal», affirme celui qui est aussi candidat à la présidence de l’Assemblée national dans les colonnes du Figaro. En tous cas, c’est ce qu’il «comprend au vu des informations qu’ils cherchent ici ou là». Pour l’ancien ministre du Budget : «ce serait comme si des juges à la commission des lois faisaient des jugements». Alors qui ? «Je ne préfère pas un RN à un FI, il ne faut pas me faire dire cela. Je ne suis pas un extrémiste», précise-t-il. Il ajoute malgré tout: «Je dis simplement que les Insoumis ont visiblement en tête de faire du contrôle fiscal. Ce que je n’ai pas entendu au RN.»
Fabien Roussel affirme que Macron «envisage» la constitution d’un «gouvernement d’union nationale». «Emmanuel Macron m’a demandé si un gouvernement d’Union nationale était une solution», a affirmé ce mardi le secrétaire national du Parti communiste, Fabien Roussel au micro de LCI. Et de préciser aussitôt sa réponse: «je lui ai dit que ce qui était important, c’est d’abord la politique que nous allons mettre en œuvre». «On a déjà participé à un gouvernement d’Union nationale en 1945 avec le général de Gaulle. Ce n’est pas quelque chose qui nous choque. J’ai dit à Emmanuel Macron que tout dépendait du projet», a-t-il ajouté, précisant que ce projet devait être «high level».
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"E. #Macron m'a demandé si un gouvernement d'Union nationale était une solution (...) Je lui ai dit que ce qui était important, c'est d'abord la politique que nous allons mettre en œuvre"
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Dans la nouvelle Assemblée, «la suite ne va pas être si simple» avertit Sophia Chikirou. «Je vous le dis encore j’insiste les choses ne vont pas se passer comme on a l’habitude qu’elles se passent», a prévenu au micro de LCP la néo-député de Paris, Sophia Chikirou. «Les quatre groupes qui constituent la nupes vont devoir trouver un fonctionnement», a-t-elle insisté. Selon elle, «si on veut de la stabilité, si on veut de la force», il faudra «un groupe unique».
"Les quatre groupes qui constituent la NUPES à l'Assemblée vont devoir trouver un fonctionnement, qui compte tenu de ce qu'est l'Assemblée nationale, terminera par un groupe unique", estime @chikirouparis. #CVR pic.twitter.com/sFi5wzgflV
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Le député LREM Sylvain Maillard ouvert à la discussion avec l’extrême droite. Faute de majorité absolue, place à la realpolitik. «Les Français ont demandé à ce qu’on soit plus ouverts pour aller chercher des majorités à chaque fois sur chaque projet de loi, que ce soit le RN, ou avec tous», indique le député réélu de Paris, selon Public Sénat. Qui ajoute : «Pourquoi on discuterait moins avec le RN qu’avec LFI ? Il faut le faire avec l’ensemble des forces politiques, qui nous plaisent ou ne nous plaisent pas».
Quel est le profil des nouveaux députés RN ? Profession, âge, sexe, expérience politique… La très grande majorité des 89 nouveaux élus Rassemblement national à l’Assemblée nationale détiennent déjà un mandat local. La moitié exercent également une profession de cadre. Libération fait le point.
Marine Le Pen constructive, sur le papier. «J’ai rappelé au chef de l’état que le groupe de 89 députés que j’ai l’honneur de présider est un groupe dans l’opposition mais qui ne souhaite pas être dans l’obstruction systématique», a souligné Marine Le Pen à la sortie de l’Elysée ce mardi soir. La cheffe de l’extrême droite assure vouloir avant tout «travailler pour améliorer la vie des Français et l’avenir de nos enfants». Et dans cette optique, «si des mesures vont dans le bons sens, nous les voterons […], si elles vont dans le mauvais sens, nous les amenderons, et si elles ne sont pas amendées telles que nous le souhaitons, nous nous y opposerons», affirme-t-elle.
Edouard Philippe ne postule pas à Matignon. Questionné sur un éventuel retour au poste de Premier ministre, le maire du Havre s’est montré clair : «Je suis certain de ne pas être le mieux placé pour discuter avec des LR, qui voient en moi un ‘‘irritant’’, pour montrer que nous sommes dans une logique nouvelle». Edouard Philippe n’a pas pour autant livré de nom de premier ministrable en puissance : «Dans une logique de coalition, il faudra peut-être trouver des profils nouveaux». En somme, pas de Gérald Darmanin ou de Bruno Le Maire.
Edouard Philippe estime que la coalition qu’il appelle de ses voeux «n’est possible» ni avec le RN ni avec la France insoumise. Pour l’ancien Premier ministre, qui souhaite l’élaboration d’une «grande coalition» à l’Assemblée nationale, «il semble difficile d’imaginer que cette coalition puisse intervenir entre majorité relative et RN». Avec La France insoumise, non plus, «ça n’existe pas». En revanche, il est possible «d’imaginer une discussion franche directe, un compromis» avec LR. Ce compromis «peut aussi exister avec les socialistes et les écologistes». «Nous devons nous mettre dans la tête que ça sera le seul moyen d’avoir une majorité stable», termine Edouard Philippe, invité de BFMTV.
Édouard Philippe (@EPhilippe_LH): "Il est possible d'imaginer un compromis" avec Les Républicains pic.twitter.com/DyRHlH5ODC
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Edouard Philippe reconnaît que Jean-Luc Mélenchon a «remporté une victoire stratégique». Le maire du Havre et ancien Premier ministre juge que Mélenchon «a réussi, avec du talent, à occuper l’espace médiatique et politique. Il a remporté une victoire stratégique», estime-t-il aussi. Edouard Philippe est ce mardi l’invité de BFMTV. Selon lui, «la Ve est un régime parlementaire, même si beaucoup de présidents l’ont oublié. Le Président doit prendre en compte l’élection parlementaire. Il va le faire».
Pour Edouard Philippe, différentes «forces politiques» doivent «peut-être élaborer un gouvernement». L’ancien Premier ministre a pris la parole ce mardi soir, deux jours seulement après le second tour des élections législatives. «Le résultat des élections législatives nous place dans une situation inédite», juge-t-il sur BFMTV. Et d’expliquer : «Aucune famille politique n’a la possibilité de gouverner seule. Il faut écouter ce qu’ont dit les électeurs : les responsables de l’Assemblée doivent travailler ensemble.» Puis : «Nous allons devoir constituer une grande coalition avec des gens qui n’ont pas envie de travailler ensemble, qui se sont critiqués, qui se sont engagés sur des programmes différents.» Ce ne sera, selon Philippe, «ni le programme entier sur lequel le Président s’est engagé, ni celui des oppositions». Il faut, estime-t-il, trouver un programme d’équilibre entre plusieurs partis. Il conclut tout de même : «Je ne sais pas si c’est possible.»
Reportage
Mathilde Panot réélue présidente du groupe insoumis à l’Assemblée. La députée du Val-de-Marne a été de nouveau choisie, à l’unanimité, pour reprendre les commandes de la présidence du groupe LFI à l’Assemblée nationale.
Pour Raquel Garrido, le groupe insoumis à l’Assemblée «a de la gueule». Elle est ravie. La tombeuse de Jean-Christophe Lagarde et nouvelle députée de Seine-Saint-Denis était «très contente» ce matin au moment de la photo de famille. «Ça fait un beau groupe, ça a de la gueule. Il y a des des gens extraordinaires, aux parcours différents et exceptionnels», déclare ce soir Raquel Garrido sur BFMTV, qui se souvient «parfaitement» de l’entrée des 17 députés LFI il y a cinq ans. Elle dénonce toutefois une «tactique de bidouillage» face au risque de voir le RN récupérer la présidence de la prestigieuse commission des finances. «Si vous continuez à vous mettre en sandwich autour de nous, on restera soudé au sein de la Nupes», indique-t-elle ainsi.
A l’Assemblée, le Rassemblement national ne votera «a priori» pas la motion de censure contre le gouvernement. L’idée a été lancée par les insoumis hier. Et si une motion de censure était déposée pour renverser le gouvernement ? Un timing a été évoqué : le 5 juillet. Pour qu’elle soit adoptée, la motion doit recueillir la majorité absolue, soit 289 sièges. La Nupes ne se suffit donc pas à elle-même et serait contrainte d’aller chercher des voix ailleurs. Ce mardi, la députée RN des Alpes-Maritimes Alexandra Masson déclare sur BFMTV «qu’a priori, il n’y a aucune raison», pour que son parti la vote. L’élue d’extrême droite reproche à Jean-Luc Mélenchon d’être dans une «posture négative» et de promouvoir la «déconstruction».
La Nupes veut «redonner à l’Assemblée son rôle central». Ambiance rentrée des classes pour les députés de gauche. Toute la journée, ils ont visité l’Assemblée, pris des photos, enfilé l’écharpe tricolore… Et commencé à s’exprimer. Eric Coquerel, député LFI de Seine-Saint-Denis, assure ce mardi que l’opposition de gauche va continuer de «s’opposer», comme elle «l’a fait pendant cinq ans», sans oublier d’être «force de propositions». L’élu de la Nupes explique aussi vouloir «redonner à l’Assemblée son rôle central dans la vie politique française» dans le but de «contrecarrer les plans prévus et préparés à l’Elysée».
Jean-Luc Mélenchon appelle Elisabeth Borne à se soumettre au vote de confiance des députés. Le leader de la Nupes est en promenade toute la journée à l’Assemblée nationale. Il en profite : c’est le dernier jour où il peut accéder à l’hémicycle. Son mandat prend fin ce soir. Alors il accompagne les petits nouveaux. Et lance quelques petites phrases à la volée. Comme quand il s’adresse, à distance, à Elisabeth Borne : «Madame la Première ministre, vous devez venir ici et solliciter le vote des députés pour avoir la confiance», s’est-il écrié. Quelques heures plus tôt, devant la presse, Mélenchon disait aussi : «Cette femme n’a aucune légitimité, zéro. Nous sommes en train de perdre notre temps, jusqu’à ce qu’elle parte.»
Eric Woerth annonce être «candidat à la présidence de l’Assemblée nationale». Dans une interview au Parisien ce mardi, l’ancien LR passé en macronie assure regretter que Richard Ferrand, qui «avait vocation à poursuivre son travail au perchoir» ait perdu aux élections législatives. Eric Woerth annonce désormais vouloir se «placer dans la continuité de son action». Il dit vouloir «tout faire pour que les institutions de notre République ne soient pas bloquées» car, estime-t-il, «les Français ne le comprendraient pas». Eric Woerth aspire donc à devenir président de l’Assemblée nationale. Ce n’est pas le premier candidat à ce poste : Joël Giraud, ancien ministre de la Cohésion des territoires et Annie Genevard, numéro 2 de LR et vice-présidente de l’Assemblée nationale, ont dévoilé leurs intentions plus tôt dans la journée.
Jean-Luc Mélenchon recule sur l’idée d’un groupe unique de la gauche à l’Assemblée. Lundi, le leader de la Nupes exprimait son envie de voir la gauche unie dans un seul et même groupe à l’Assemblée nationale. La Nupes, pensait-il, doit être plus qu’un simple intergroupe alors que le RN, à lui-seul, comptabilise 89 députés, ce qui fait de lui le principal groupe d’opposition. Une intervention qui a surpris ses partenaires, alors que le contrat signé jusque-là ne prévoyait pas un groupe commun. Le PS, le PCF et EE-LV lui ont donc gentiment demandé de remballer sa marchandise. Mélenchon a dû se rendre à l’évidence et fait désormais machine arrière. «J’ai peut-être été trop rapide hier. Peut-être que ça n’est pas comme ça qu’il faut faire. On m’a dit que ça faisait perdre du temps de parole. Bon bah voyons, voyons», concède-t-il ce mardi après-midi.
Attal et Grégoire en défenseurs d’une Elisabeth Borne affaiblie. Deux ministres, un même message. A la sortie de la réunion gouvernementale organisée ce mardi après-midi à Matignon autour d’Elisabeth Borne, Gabriel Attal et Olivia Grégoire ont pris le temps, devant la presse, de défendre leur patronne affaiblie après la claque des législatives. «On a un gouvernement avec une Première ministre au travail», n’a pas manqué de répété la porte-parole du gouvernement (six fois en deux minutes). La preuve : elle participera demain à la réunion de la majorité à l’Assemblée et elle recevra les présidents de groupes parlementaires la semaine prochaine fait savoir Grégoire. Son prédécesseur, aujourd’hui ministre des Comptes publics Gabriel Attal a, quant à lui, sorti les griffes contre Jean-Luc Mélenchon qui estime que Borne n’est plus légitime. «Je trouve assure curieux d’entendre un homme qui n’a pas été élu par les Français, qui voulait être Premier ministre, qui n’a pas pu l’être, donner des leçons de légitimité à une femme Première ministre qui a été élue par les Français», grince le ministre.
Bayrou appelle Macron à se «rapprocher aussi près que possible de l’union nationale». A son tour convié à échanger le président de la République, l’allié de toujours François Bayrou a, lui, appelé le chef de l’Etat à tout faire pour «se rapprocher aussi près que possible de l’union nationale». Selon le patron du Modem, «il y a une coresponsabilité qui s’impose à nous tous face à ce qui nous attend». Il développe : «Il y a eu des campagnes électorales, il y a eu des confrontations, des affrontements mais au moins, chacun doit se sentir une part de responsabilité dans ce qui vient.» Mais attention, le maire de Pau n’appelle pas à un gouvernement d’union nationale : «Ce n’est pas très approprié à la période parce que ça veut dire que tout e monde participe au programme», concède-t-il.
La LR Annie Genevard candidate au Perchoir. Toute juste réélue pour un troisième mandat dans la 5e circonscription du Doubs, Annie Genevard se verrait bien quatrième personnage de l’Etat. La numéro 2 des Républicains a annoncé au Figaro qu’elle était candidate à la présidence de l’Assemblée nationale. «C’est dans l’hémicycle et non dans la rue que doivent se tenir les débats qui animent notre pays. Chaque Français doit pouvoir retrouver l’expression de son opinion à l’Assemblée nationale et c’est la raison pour laquelle la présidence doit incarner ce respect du débat contradictoire», explique-t-elle au quotidien. Celle qui était vice-présidente de l’Assemblée ces cinq dernières années pourrait avoir plusieurs candidats issus de la macronie sur son chemin. Barbara Pompili, Roland Lescure et Joël Giraud pourraient se montrer également intéressés par le poste.