«Bonjour, c’est Marion Maréchal. Dimanche, votez pour stopper l’immigration, l’insécurité, l’assistanat et l’enfer fiscal.» Comme Maurice Martin, sur X (ex-Twitter), des internautes témoignent de messages reçus, émanant de partis politiques ou de candidats, sur leur téléphone en vue des élections européennes. Plusieurs d’entre eux se questionnent sur la légalité de ce genre de communication.
Les partis ont-ils le droit de communiquer par SMS aux Français ?
CheckNews s’était déjà penché sur la question à l’occasion des élections départementales et régionales de 2021. La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) expliquait alors qu’un «candidat ou un parti politique peut acheter ou louer une base de données contenant des numéros de téléphone auprès d’une société privée».
Les partis demandent alors à la société privée de viser un public spécifique, à la manière d’une prospection commerciale : âge, sexe ou zone spécifique en fonction des résultats électoraux précédents. Mais ne se préoccupent pas d’un éventuel consentement des personnes sélectionnées. Une zone grise reconnue par la Cnil : «dans ces cas de collecte indirecte de coordonnées, les modalités de la collecte initiale (notamment l’information délivrée, le consentement à être prospecté par des “tiers partenaires” et le droit de s’y opposer) ne sont pas nécessairement connues du parti ou du candidat qui les réutilise ni même adaptées à la prospection politique», ajoute toutefois la commission.
C’est pourquoi, la Cnil recommande qu’un premier message téléphonique soit adressé aux personnes concernées afin de «recueillir leur accord à être démarchées spécialement à des fins de communication politique». Une bonne pratique que la plupart des listes concernées n’ont pas suivie selon les constatations de CheckNews en 2021. Sur son site, la Cnil précise également qu’en vertu du règlement général sur la protection des données (RGPD), le candidat ou le parti politique a obligation de fournir à la personne qui reçoit le texto «l’origine des données utilisées», si elle en fait la demande.
Quelles bases de données sont choisies par les partis ?
LFI, pour les Européennes, envoie par exemple : «Ce dimanche 9 juin : contre la vie chère et pour la paix à Gaza, VOTEZ France insoumise avec M. Aubry et JL. Mélenchon», avant de rediriger le destinataire vers la page officielle du parti pour les Européennes – et son «espace procuration». Concernant les critères choisis pour cibler les destinataires de cet envoi, Coline Maigre, attachée de presse de la France Insoumise, nous explique, par message écrit, que les SMS «ont été envoyés aux électrices et électeurs rattachés à des bureaux de vote qui ont largement voté pour Jean-Luc Mélenchon lors de la dernière élection présidentielle». «Cet envoi a été effectué par le prestataire SelfContact, leader de la communication électorale, dans le strict respect des règles de la Cnil et du RGPD», précise l’attachée de presse.
Euh c'est normal de recevoir ce genre de SMS ? Et c'est que tous les partis où le droit de le faire ?
— Rory Ier, Free Palestine 🍉 (@Saamodeus) June 6, 2024
Sachant que je suis aucunement lié à LFI je précise. Juste j'ai reçu ce SMS sans savoir comment c'est possible pic.twitter.com/pYwxxrbyT7
«Nous avons confié à SelfContact, le leader de la communication électorale notre campagne de Sms», confirme de son côté Thibaut Monnier, directeur de cabinet de Marion Maréchal, tête de liste Reconquête. «Les coordonnées des destinataires de notre communication sont issues d’une base de données Opt’in», poursuit-il. Une mention qui atteste que le destinataire a bien donné son consentement pour recevoir des publicités, explique la Cnil. Par exemple, en acceptant que son numéro de téléphone soit utilisé à des fins publicitaires, et autorisant la transmission de ces données à des partenaires.
Sur son site, SelfContact propose des services de «SMS électoraux interactifs», «SMS Mi-Mandat» ou autres «SMS Vidéo-Consultation». La page dédiée aux «références» de l’entreprise montre que l’opération est assez commune parmi les politiques, avec des noms comme Emmanuel Macron, Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon.
Comment bloquer ce genre de communications ?
«En tout état de cause, le citoyen dispose du droit de s’opposer à l’utilisation de son numéro de téléphone à des fins de communication politique, sans avoir à justifier des raisons de sa démarche», rappelle la Cnil. Sur sa page «ne plus recevoir de SMS publicitaires», l’organisation préconise simplement de «répondre “STOP”» à ce genre de message pour s’opposer à la réception de nouveaux SMS publicitaires. Mais attention, cette solution ne fonctionne que pour des numéros composés de cinq chiffres et commençant par 3, 4, 5, 6, 7 ou 8.