Alors que Gabriel Attal a présenté sa démission au Président de la République mardi 19 juillet, le gouvernement actuel va rester quelque temps en place afin de gérer les «affaires courantes». Une situation qui inquiète le parlementaire guyanais Jean-Victor Castor (Gauche démocrate et républicaine), préoccupé par les difficultés ou les crises que traversent certains territoires d’outre-mer, comme la Nouvelle-Calédonie en proie à des troubles politiques, la Guadeloupe soumise à de fortes restrictions dans l’accès à l’eau potable ou Mayotte confrontée à un immense défi migratoire.
Quelles sont les conséquences du flottement politique actuel pour les territoires ultramarins ?
Depuis deux ans, on a changé à plusieurs reprises de ministre des Outre-mer. Il y avait une forme de discontinuité politique qui n’arrangeait déjà pas les choses. Des ministres et des cabinets se sont enchaînés, empêchant toute continuité. Avec une ministre démissionnaire [Marie Guévenoux, ndlr], il va être compliqué de gérer les crises ces prochaines semaines. Déjà qu’il y a des difficultés politiques permanentes en temps normal, là on n’a même plus d’interlocuteur. Il y a des situations complexes dans les territoires ultramarins, avec des retards de développement, des enjeux démographiques à Mayotte et en Guyane, avec des nécessités de coopération, qui sont compliquées par des normes et des conditions qui ne sont pas du tout adaptées à ces territoires. Il y a aussi des questions essentielles, comme celle de l’autonomie demandée par la Martinique, la Guyane, bientôt la Guadeloupe, celle de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, ou encore celle des peuples autochtones. Par ailleurs, on ne comprend pas ce que signifie «gérer les affaires courantes». Elles sont déjà gérées par le préfet. Bien que les membres du gouvernement déclarent ne pas prendre de décisions, je pense qu’au vu des différentes crises, ils vont agir.
C’est-à-dire ?
On les voit prendre des initiatives alors qu’ils ne sont pas censés pouvoir le faire. En Nouvelle-Calédonie, ils sont obligés en raison de la crise, pour tenter de la régler. Ils ne peuvent pas rester sans rien faire. En Guadeloupe aussi, on a une vraie crise par rapport à l’accès à l’eau, et les citoyens se mobilisent, des barrages se mettent en place… La situation est extrêmement tendue partout et oblige à l’action.
Cette situation risque-t-elle d’aggraver les crises ?
Forcément. En Nouvelle-Calédonie par exemple, on ne va pas entamer des négociations avec un gouvernement qui est démissionnaire, mais qui reste en place, alors qu’il a été défait par les urnes. Déjà qu’on avait vraiment du mal à se faire entendre avec un gouvernement en place… En Guyane, par exemple, il y a un processus pour demander une évolution statutaire. On ne peut pas continuer les discussions avec Marie Guévenoux, qui avaient d’ailleurs mal commencé. Elle avait en effet avoué ne pas être au courant de notre demande, alors que les discussions avaient débuté sous le gouvernement d’Edouard Philippe. On voit bien que les territoires ultramarins sont relégués au second plan.
Qu’attendez-vous du prochain gouvernement ?
On a vraiment besoin d’un gouvernement stable, d’un ministère stable, qui soient sincères dans le traitement du pays. Il faudra une vraie stabilité technico-administrative. Pour le ministère des Outre-mer, il faudra quelqu’un qui soit à l’écoute, et qui connaisse la réalité du terrain, les diversités, complexités et spécificités de chaque territoire, ce que l’on n’a pas connu jusque-là. Le ministre devra être issu du Nouveau Front populaire, car c’est le seul regroupement politique qui a développé un certain nombre d’idées primordiales pour les territoires ultramarins. Mais le programme ne suffit pas, il faut que les choses changent véritablement, il faudra donc mettre la pression pour le faire appliquer.