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Interview

«Il faut oublier les ego et les divergences» : la Ligue des droits de l’homme appelle à faire front à l’extrême droite

Elections législatives 2024dossier
Pour l’avocate et présidente de la LDH, Nathalie Tehio, la décision du chef d’Etat de dissoudre l’Assemblée nationale est «irresponsable». Selon elle, plus que jamais, cette situation illustre l’importance d’être à l’écoute de la société civile et de rassembler les «forces progressistes» pour coconstruire un «front commun».
Lors du rassemblement après l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale, place de la République, à Paris, dimanche 9 juin au soir. (Cha Gonzalez/Libération)
publié le 10 juin 2024 à 16h36

L’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, dimanche 9 juin, a fait l’effet d’une bombe politique. Et la perspective de voir l’extrême droite accéder à Matignon génère des appels à l’unité pour résister. De la part de politiques, certes, mais aussi de personnalités de la société civile. Parmi eux, la Ligue des droits de l’homme qui a publié tôt dans la journée de ce lundi 10 juin un communiqué dans lequel l’association demande aux forces progressistes de «dialoguer, mettre l’ensemble de leurs divergences de côté, se mobiliser afin de proposer un front commun dans le champ électoral face à l’adversité». Elle exhorte les partis politiques à se rapprocher dès maintenant des «forces syndicales et associatives» afin de travailler à garantir «les valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité que nous portons». Nathalie Tehio, avocate et présidente de la Ligue des droits de l’homme, détaille auprès de Libé cet appel, ses inquiétudes et ses espoirs.

Dimanche soir, Emmanuel Macron a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale à la suite des résultats des élections européennes. Quelle a été votre réaction ?

A la Ligue des droits de l’homme, nous nous attendions à ces résultats vu les sondages réalisés au préalable, même si cela fait toujours un choc de voir la France sous les couleurs du Rassemblement national. En revanche, nous n’avions pas vu venir la dissolution de l’Assemblée nationale, cela paraissait irresponsable. Il y avait une part de sidération. C’est une décision irresponsable qui dépasse l’outrance de la part du chef de l’Etat, qui met à mal les institutions et l’Etat de droit.

Vous n’avez pas peur que la fragmentation des gauches rende vains les appels à l’unité ?

Nous ne pouvons pas accepter ce qui est en train de se jouer. Nous appelons à ce que la société civile pèse sur les forces politiques pour rassembler et donner espoir : dimanche soir, après l’annonce des résultats et de l’allocution d’Emmanuel Macron, les gens se sont rassemblés. Nous sommes sur la même ligne. Il faut oublier les ego et les divergences pour s’unir : nous y croyons et il est encore temps à condition de le faire vite et de nous écouter. Nous pouvons coconstruire des choses avec nos partenaires. Le fait que l’extrême droite soit au pouvoir renforce nos idées selon lesquelles la société civile doit peser autant qu’elle peut.

Selon vous, quels sont les principaux risques d’avoir le RN au pouvoir ?

En réalité, cela fait longtemps qu’Emmanuel Macron met à mal l’Etat de droit. Il a programmé cette situation. Avec l’extrême droite au pouvoir, le premier principe attaqué est celui d’égalité et donc de fraternité : la solidarité. Pour faire passer des lois qui divisent la société, un gouvernement d’extrême droite se servira des lois autoritaires déjà votées et il pourra continuer dans cette ligne, ce qui atteint le principe de liberté. Ce sont les raisons pour lesquelles il est vital pour la démocratie de dialoguer et de déterminer concrètement ce que nous pouvons faire contre l’extrême droite.