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Libération
Gauche estivale

Dévoilant son projet politique et sa vie privée, Lucie Castets relance sa campagne médiatique

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Auprès de «Sud-Ouest» et «Paris-Match» le 6 août, la candidate du Nouveau Front populaire pour Matignon liste les mesures qui pourraient faire l’objet de «compromis» à l’Assemblée et livre son coming out.
Lucie Castets est la candidate du Nouveau Front Populaire pour Matignon depuis le 23 juillet mais Emmanuel Macron refuse de la nommer. (Alain Apaydin/ABACA)
publié le 6 août 2024 à 22h38

Fini les premiers terrains. Après un déplacement à Lille puis dans l’usine Duralex, près d’Orléans, place aux «interviews vérité». Plus que jamais candidate à Matignon au nom du Nouveau Front populaire, Lucie Castets bouscule un peu plus la «trêve olympique» décrétée par Emmanuel Macron. La haute fonctionnaire a choisi Paris Match pour en dire un peu plus sur sa vie personnelle et sa personnalité, et a opté pour Sud-Ouest afin de dérouler ce que la gauche pourrait faire – et comment – si le chef de l’Etat venait à la nommer à Matignon. Ce qu’il n’a toujours pas l’intention de faire…

«Je ne suis pas dans une position d’attente. Je suis au travail», insiste, dans le quotidien régional, celle qui échange très régulièrement avec tous les autres responsables du NFP partis en vacances. Si des propositions encore plus précises – notamment sur le budget 2025 – sont en préparation et devraient être dévoilées dans les prochaines semaines, la fondatrice du collectif «Nos services publics» liste dans cette interview les mesures qui pourraient faire l’objet de «compromis» avec d’autres forces représentées à l’Assemblée.

«On pourra s’entendre pour revaloriser le travail de nuit des infirmières, recruter des AESH pour que les enfants en situation de handicap aient une scolarité normale, ouvrir de nouvelles places en crèche ou encore construire un service public territorial de santé avec les élus locaux», dit-elle, prenant une distance supplémentaire avec les insoumis qui continuent de répéter que si le NFP gouverne, ce sera pour mettre en œuvre «tout le programme». «Nous sommes conscients que nous n’avons pas de majorité absolue, répond Castets dans Sud-Ouest. Nous savons que pour avancer, il faudra trouver des compromis et travailler, texte par texte, avec les parlementaires de l’Assemblée et du Sénat.»

«Nous perdons du temps»

Le début d’un recentrage après avoir été très accompagnée sur le terrain par les députés insoumis et que l’aile droite du Parti socialiste a réclamé une «clarification» avec LFI ? En tout cas, Lucie Castets profite de cette sortie média pour prendre ses distances avec Sophia Chikirou. La députée de Paris, très proche de Jean-Luc Mélenchon, avait relayé sur son compte Instagram privé un post concernant la mort d’Ismaïl Haniyeh, dans laquelle le fils de ce chef du Hamas le présentait comme un «martyr» et le chef de la «résistance» palestinienne. «Cette publication n’était pas acceptable et contraire à tout ce que défend le NFP», affirme Castets dans Sud-Ouest, rappelant «que le NFP condamne sans réserve les attaques terroristes du 7 octobre perpétrées par le Hamas».

Mais les principales cibles de la directrice des finances de la ville de Paris restent Emmanuel Macron et son gouvernement démissionnaire. Comme la cheffe des écologistes, Marine Tondelier, dès lundi dans une vidéo, Lucie Castets dénonce la préparation, selon elle «sans légitimité démocratique» du projet de loi de finances 2025 par Bercy. «Il est très problématique d’affirmer qu’on est en “trêve” et de préparer un budget. C’est aller au-delà de la gestion des affaires courantes, attaque-t-elle. C’est d’autant plus problématique que, selon mes informations, il prépare un budget qui persiste dans cette politique majoritairement rejetée par les électeurs. Or, revenir à l’austérité quand l’économie ralentit, comme on l’a vu en juillet, est une grave erreur. Il est urgent de changer de pied, mais nous perdons du temps.» «Oui, Bercy a envoyé au Premier ministre sa copie sur le budget, concède-t-on à Matignon. Mais c’est une base nécessaire, qui permettra au prochain gouvernement d’avoir toutes les options et de faire ses choix politiques. Matignon n’a d’ailleurs pas envoyé les lettres-plafond qui fixent les dépenses maximums de chaque ministère.»

Seconde cible : Xavier Bertrand, dont le nom revient régulièrement pour tenter une alliance du «bloc central» macroniste avec une partie de la droite. Une telle nomination serait, selon Castets, une «aberration». «Les Républicains, le parti de Xavier Bertrand, a obtenu 6 % au premier tour des législatives, rappelle-t-elle. Comment nommer un Premier ministre qui n’a pas de majorité et qui ne représenterait que lui-même ?» Et la haute fonctionnaire d’attaquer le bilan de l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy lorsqu’il était à la tête d’un grand ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé : «C’est l’affaiblissement des financements de l’hôpital, une suppression massive de lits, l’explosion des constructions d’Ehpad privés, une réforme injuste des retraites…»

«Dire qui je suis»

Voilà pour la partie politique… Mais dans un temps estival où les responsables politiques ont bien du mal à exister face aux athlètes français en lice aux JO, mieux vaut, pour être entendue, parler d’autre chose que de financement du smic à 1 600 euros ou augmentation des impôts des «plus fortunés». Castets a donc choisi Paris Match – pourtant propriété de Vincent Bolloré – pour évoquer sa vie personnelle et dire son homosexualité, comme l’avait fait Gabriel Attal. «Je souhaite trouver un équilibre entre protéger ma famille, ma femme et notre enfant, et dire qui je suis», explique-t-elle à Paris Match, qui précise que le couple a un enfant de deux ans et demi. Elle dit être déjà victime de messages de «haters d’extrême droite» à propos de son union avec une femme. Elle raconte également être une grande sportive – entre autres, adepte du tennis, de handball, de taekwondo et fan de surf – afin de défaire cette image d’énarque et de technocrate parisienne qui lui colle à la peau. «Je n’ai rien à prouver. Je suis bien dans mes baskets, les gens découvriront cela, ou pas», assume celle qui rappelle que si elle travaille à Paris, elle a vécu à Caen jusqu’à 18 ans.

Cette incursion médiatique en appelle-t-elle d’autres ? Aucun déplacement n’est, pour l’instant, à l’ordre du jour de la Normande. Son équipe la dit «au travail sur le projet» à Paris, scrutant aussi le moindre bougé du côté de l’Elysée dans la course de vitesse qui se prépare une fois les JO clôturés. «Nous nous réunissons régulièrement [en visio] pour préparer la fin des JO, assure le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, depuis son camping corse, et annoncer aux Français ce que nous comptons mettre en œuvre, comment nous comptons le financer et avec des ministres prêts à travailler.» Reste un petit détail à régler : qu’Emmanuel Macron nomme Lucie Castets à Matignon. Et c’est encore loin d’arriver.

Mise à jour mercredi 7 août à 16 h 48, avec analyses.